Économie

Nintendo, la Rolex du jeu vidéo

Par Judikael Hirel. Synthèse n°2518, Publiée le 02/07/2025 - Illustration : Mario Kart World, le dernier jeu vidéo à succès de Nintendo.
Crédits : Nintendo.
Décennie après décennie, le succès phénoménal des consoles et des jeux vidéo de la marque japonaise laisse rêveur. Plus qu'à Apple, elle fait au fond penser à un autre géant, mais de l'horlogerie cette fois : la célèbre marque à la couronne.

Comme à chaque nouveau lancement signé Nintendo, les analystes estimaient que la deuxième génération de la Switch, permettant de jouer chez soi comme n'importe où, ne pourrait pas surpasser en ventes la première génération lancée en 2017. Il faut dire que la Switch originelle s'est déjà vendue à plus de 152 millions d'exemplaires en huit ans. De quoi faire d'elle la troisième console la plus vendue de l'histoire, derrière la PlayStation 2 (plus de 160 millions de ventes)…et la Nintendo DS (154 millions). Mais après tout, jadis, après le succès fou de sa Wii (100 millions de consoles), la Wii U avait fait un flop, avec 13,5 millions d'unités vendues.
Finalement, les analystes se sont entièrement trompés : pas besoin d'innover pour avoir du succès. La Switch 2 est juste plus grande, plus puissante… et plus chère ! Mais avec une marque forte, un produit intergénérationnel à la qualité reconnue, et une capacité à en proposer régulièrement de nouvelles itérations. Tout comme Rolex, au fond, avec ses modèles phares de montres de luxe : telle la Submariner, née dans les années 1950, mais reconnaissable au premier coup d'œil et toujours aussi convaincante à chaque nouvelle évolution. Résultat : malgré les aléas douaniers de l'administration Trump, la Switch 2 s'est déjà vendue à 3,5 millions d'exemplaires en l'espace de seulement quatre jours. Soit plus que tout autre produit de la firme japonaise jusque-là. En comparaison, en 2017, la Switch s'était vendue à 2,7 millions d'exemplaires, mais en un mois. Comme l'a reconnu Shuntaro Furukawa, l'actuel président de Nintendo, « actuellement, dans de nombreux pays, la demande pour la Switch 2 dépasse l'offre, et nous ne sommes pas en mesure d'y répondre. La demande initiale a largement dépassé nos attentes, et j'ai annoncé en mon nom sur X qu'il y avait 2,2 millions de demandes en attente, accompagnées de mes excuses. »
La nouvelle console séduit clairement plusieurs générations de joueurs. Ainsi, « sans chercher à bouleverser la formule, la Switch 2 reprend le principe de sa grande sœur : une tablette tactile qui offre des jeux de qualité console jouables sur le téléviseur lorsqu'elle est connectée à la station d'accueil. Vous pouvez ensuite l'emporter partout en mode portable, ou détacher les manettes pour jouer en mode table. » Certes, de nouvelles consoles portables concurrentes, comme le Steam Deck et l'Asus ROG Ally, ont fait leur apparition au cours des huit années qui ont suivi l'arrivée des Switch. Mais aucune n'offre un changement de mode de jeu aussi fluide : la marque à l'origine des Game Boy et Nintendo DS demeure le leader historique des consoles de jeu portables. Et ce, malgré des prix constamment en hausse, pour ses consoles comme pour ses jeux, de Mario à Pokemon en passant par Zelda. Ses tarifs ont fini par poser le standard des tarifs du marché, y compris pour ses concurrents. Comptez tout de même 500 € pour vous offrir une Switch 2, et 70 € pour son jeu phare au lancement, Mario Kart World.

Qui aurait pu imaginer que le créateur de la NES (Nintendo Entertainment System) en 1983 en serait là aujourd'hui quand tant d'autres grands noms de la high tech, tel Nokia, ont disparu ? Plus encore, qui sait seulement que Nintendo est en fait un très ancien et vénérable fournisseur officiel de l'empereur du Japon ?
L'entreprise Nintendo Koppaie, (littéralement « Laissons les Dieux en décider ») a en effet été créée en 1889 à Kyoto. Son métier d'origine : la fabrication de cartes à jouer au hanafuda (jeu des fleurs), un jeu traditionnel japonais. Une activité qui a perduré, mais ne représente plus que 1 % du chiffre d'affaires de la société. Dès les années 1970, Hiroshi Yamaushi, arrière-petit-fils du fondateur, décidera de se lancer dans l'informatique, plutôt que de s'allier à Atari. L'histoire mondiale du jeu vidéo en aurait été bouleversée… Avec Mitsubishi, la TV Game 6, console regroupant six jeux façon Pong, voit le jour en 1977, et se vend à un million d'exemplaires. De quoi convaincre Nintendo de partir à l'assaut du marché des jeux d'arcade… et d'échouer ! Il va falloir racheter des milliers de bornes, y intégrer de nouveaux jeux, et les redécorer. Le créatif maison, Shigeru Miyamoto, s'inspire alors de King Kong pour imaginer un grand singe enlever la fiancée d'un personnage moustachu. Donkey Kong et Mario étaient nés, et allaient générer 100 millions de dollars dès 1981 ! De quoi donner envie de lancer la NES en 1983, alors bien moins chère que les consoles concurrentes. En 2013, Hiroshi Yamauchi, l'ancien président de Nintendo qui a transformé une petite compagnie de cartes à jouer en géant mondial du jeu vidéo, mourait à 85 ans. Mais le succès de son entreprise, lui, ne se dément pas : en 2024, le chiffre d'affaires de Nintendo s'élevait à 956,2 milliards de yens, soit environ 5,92 milliards d'euros.

La sélection
Lire l'article (en anglais) sur le site Leaders
How Nintendo Hit the Reset Button (Twice)
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