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L'immigration divise toujours l'Union Européenne

Par Philippe Oswald - Publié le 06/10/2023 - Photo de Jorge Guerrero/AFP : (De g. à d.) Le Premier ministre hongrois Viktor Orban, la Première ministre danoise Mette Frederiksen, le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen à Grenade.


Le sommet « informel »  des Vingt-Sept qui s'est tenu le 5 et 6 octobre à Grenade, en Espagne, a été présenté comme « un grand succès » par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Layen. Y était notamment examinée une réforme du système migratoire européen, officiellement scellée à la veille de cette réunion par un accord entre les représentants des États membres. La veille de ce sommet, le 4 octobre, les ambassadeurs des pays de l'UE avaient fini par s'accorder sur un règlement mettant en place un mécanisme de solidarité obligatoire entre États membres dans le cas où l'un d'entre eux serait confronté à une « situation exceptionnelle » liée à des arrivées « massives » de migrants à ses frontières, comme cela vient de se reproduire spectaculairement pour l'Italie via la petite île de Lampedusa. Mais ce règlement, dernière pièce du « Pacte asile et migration de l'UE », était le fruit d'un compromis pour lever les réticences allemandes, puis italiennes. Il doit d'ailleurs encore recevoir l'aval du Parlement européen. Surtout, il a été adopté par les représentants des États membres à « la majorité qualifiée » comme les traités le prévoient, et non à l'unanimité comme le réclament la Pologne et la Hongrie. Ces deux pays ont donc voté contre le texte, tandis que l'Autriche, la Slovaquie et la République tchèque se sont abstenues.

A Grenade, rompant avec une communication optimiste, au demeurant d'une surprenante nouveauté sur ce sujet explosif, les dirigeants polonais et hongrois ont jeté un pavé dans la mare. N'ayant pas obtenu que la déclaration finale de ce sommet mentionne la nécessité d'une unanimité pour adopter la réforme migratoire, ils ont proclamé leur totale opposition à ce dispositif. Le Premier ministre polonais, Mateusz Morawiecki, a redit son refus de voir imposer à son pays un système de « distribution de migrants illégaux » dont on soupçonne qu'une majorité de ses concitoyens ne veulent pas (mais qui en veut en Europe ?) alors que les Polonais sont appelés aux urnes dans dix jours pour les élections législatives. « Nous n'avons pas peur des diktats qui viennent de Bruxelles et Berlin » a prévenu Mateusz Morawiecki. Plus offensif encore, le hongrois Viktor Orban a dénoncé un « viol » de souveraineté : « Si vous êtes violé légalement, forcé à accepter quelque chose que vous n'aimez pas, comment est-ce possible d'avoir un compromis, un accord ? C'est impossible ! » a-t-il lancé. Le 2 juillet, de l'autre côté de la Méditerranée, le président de la Tunisie avait jeté lui aussi un pavé dans la mare. Alors que le texte présenté comme une victoire à Grenade affirme la détermination de l'UE à nouer « des partenariats globaux mutuellement bénéfiques avec les pays d'origine et de transit », le président tunisien Kais Saied avait refusé théâtralement « la charité en qualifiant de « dérisoires » les fonds européens alloués à son pays après l'accord signé en juillet avec l'UE afin de faire baisser les arrivées de migrants. Fin septembre, Bruxelles avait en effet annoncé que 42 millions d'euros (sur un total conclu de 105 millions d'euros d'aide) allaient être « alloués rapidement » à la Tunisie pour lutter contre l'immigration irrégulière.

Autant dire que le triomphalisme de la présidente de la Commission paraît irénique. Bien qu'il paraisse « musclé » en proclamant la nécessité de traiter l'immigration irrégulière « immédiatement et avec détermination » et d' « intensifier les renvois » de migrants irréguliers, ce règlement ne fera vraisemblablement pas l'objet d'une déclaration commune de l'UE sur la migration. Un échec de plus : au début de l'été dernier, la Pologne et la Hongrie avaient bloqué deux autres textes du pacte migratoire que venaient d'agréer une majorité d'États membres.


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Sommet UE : Varsovie et Budapest vent debout contre la réforme migratoire
Lire l'article sur : La Provence
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2 commentaires
Nella
Le 09/10/2023 à 18:03
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Nella
Le 09/10/2023 à 18:02
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