Federer : God save the King !
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Federer : God save the King !

Par Maxime Bonnassies - Publié le 26/09/2022
Ce fut un véritable séisme dans le monde du tennis, du sport et même au-delà : Roger Federer a annoncé le 15 septembre mettre définitivement un terme à sa monumentale carrière, 24 ans après son entrée sur le circuit en 1998. La décision était prise depuis quelques semaines, début août. Le Maestro, qui espérait revenir une nouvelle fois sur le circuit ATP, a dû se rendre à l’évidence : il n’était plus raisonnable de continuer. « Son genou et son dos auront été, finalement, ses plus féroces et ultimes adversaires », analyse Le Point. C’est donc à l’occasion de la Laver Cup, un tournoi par équipe qu’il a lui-même initié, que le Suisse a décidé de tirer sa révérence aux côtés de son éternel rival, Rafael Nadal : tout un symbole. La soirée fut riche en émotions et terminée dans les larmes, partagées entre les deux champions.

103 titres dont 20 Grands Chelems, 237 semaines consécutives sur le trône du tennis… Les chiffres de son palmarès donnent le tournis. Mais il faut regarder au-delà de cet égrenage chiffré pour comprendre la véritable envergure de cette icône mondiale.

Federer, c’était avant tout un talent et un style extraordinaires. Son jeu dégageait quelque chose d’unique par sa légèreté, sa variété, sa pureté. La perfection de sa gestuelle, de son jeu de jambes et de sa palette de coups l’a érigé en référence pour tous les jeunes tennismen en formation. Le Suisse semblait de plus s’exécuter avec une facilité et une élégance déconcertantes : on aurait dit que ce sport était fait pour lui et que sa raquette était le prolongement naturel de sa main. « Il donnait l’impression de flotter, voire de danser, un peu comme un danseur étoile. C’est avant tout ce style aérien et cette élégance qui lui valaient une notoriété planétaire », résume Le Monde. Nadal lui-même avait d’ailleurs reconnu un « décalage de talent » et se disait « sidéré par la qualité de son jeu ».

Véritable ambassadeur de son sport, Federer a fait entrer le tennis dans une autre dimension. Son fair-play et sa classe dans la victoire comme dans la défaite ont fortement amélioré l’image et la popularité de ce sport : plus besoin d’aimer particulièrement le tennis pour regarder ses matchs. En pulvérisant les précédents records – en particulier les 14 Grands Chelems de Pete Sampras  – l’Helvète a tracé la voie vers l’impossible, faisant émerger au passage deux autres géants, Rafael Nadal et Novak Djokovic (le fameux « Big 3 »), avec qui il s’est partagé 60 des 72 tournois du Grand Chelem entre 2003 et 2021 : du jamais vu ! « L’arrivée d’une furie espagnole et d’une tempête serbe a rééquilibré les forces et posé un défi salvateur à celui que l’on nommait "PeRFect" : rester numéro un puis le redevenir » (Le Point). Son âge, plus avancé que celui de ses deux rivaux, explique en grande partie ses soldes négatifs contre eux.

C’est surtout sa rivalité avec Rafael Nadal qui est entrée dans la légende, marquée par des matchs épiques – dont 9 confrontations en finale de Grand Chelem – mais aussi par un profond respect entre les deux hommes et même une sincère amitié. Pendant des années, l’Espagnol a semblé dominer le Suisse grâce à une méthode redoutable consistant à le pilonner sur son revers avec son coup droit lifté de gaucher, empochant des victoires décisives et le privant de nombreux Grands Chelems, notamment quatre Roland-Garros. Genou à terre, le roi du tennis dévoile alors sa dimension profondément humaine, pétrie d’émotivité, comme lorsqu’il fond en larmes à l’Open d’Australie 2009 après une énième défaite contre Nadal. C’est paradoxalement en fendant ainsi l’armure qu’il achève de conquérir le cœur du public. Dès lors, ses fans vibreront, exulteront et verseront des larmes avec leur « Rodgeur ». Rafa lui-même avouera avoir pleuré d’émotion quand Roger remporta enfin Roland-Garros en 2009.

À presque 30 ans, ayant déjà tout gagné, on commence à spéculer sur sa retraite. Mais c’était compter sans la capacité du Roger à se réinventer. En 2017, à 35 ans, alors qu’il est retombé au 17° rang mondial, qu’il est arrêté depuis six mois et qu’il n’a pas gagné de Grand Chelem depuis 5 ans, il fait un come-back tonitruant en remportant l’Open d’Australie face à Nadal, après un match de légende ponctué de points monumentaux. Pour cela, il a adapté son jeu, modifié sa raquette et adopté une tactique offensive visant à écourter les points au maximum pour s’économiser. La parade fonctionne face à son meilleur ennemi : la tendance s’inverse et le Suisse devient à son tour la bête noire de l’Espagnol, remportant l’intégralité de leurs 7 derniers duels (hors terre battue). Il ajoute dans la foulée deux autres Grands Chelems à son palmarès et remonte sur le trône du tennis 5 ans après l’avoir quitté, devenant ainsi le plus vieux n°1 mondial de l’histoire.

Cette longévité exceptionnelle parachève le mythe « Rodgeur », qui aura duré 14 ans supplémentaires. Véritable marque mondiale incarnant l’excellence, l’authenticité et l’élégance, il était encore en 2020, à 40 ans, le sportif le mieux payé au monde, surclassant même les footballeurs Ronaldo, Messi et Neymar, grâce à ses contrats de sponsoring (Rolex, Wilson, Mercedes, Moët et Chandon…). Il devrait maintenant se consacrer à sa fondation, ses 4 enfants et sa femme Mirka, qui l’a soutenu et accompagné toutes ces années durant.

Que les fans de tennis se rassurent, la relève est peut-être assurée. La victoire de Carlos Alcaraz à l’US Open coïncide avec le départ du Maestro. Certains disent que le jeune Espagnol combinerait le jeu de défense de Djokovic, la combativité de Nadal et la créativité de Federer… Seul l’avenir pourra le confirmer !
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