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La superintelligence : une SUPER-consommation énergétique…

Par Michel Bronstun. Synthèse n°2603, Publiée le 19/11/2025 - Photo : Entre IA, IA générale et superintelligence artificielle, rêve ou dystopie ? Crédits : Shutterstock.
Le 21 janvier, Donald Trump a réuni à la Maison-Blanche Samuel Altmann, patron d'Open IA, Masayoshi Son, DG de SoftBank, le président d'Oracle Larry Ellison ou encore Darion Amodei, cofondateur d'Anthropic et David Sacks, le « tsar des cryptomonnaies et de l'IA », pour annoncer le lancement de Stargate, son mégaprojet d'infrastructures dédiées à l'intelligence artificielle.

Alors que l'écriture ou l'imprimerie transformaient l'histoire sur plusieurs générations, le numérique transforme le monde à une vitesse vertigineuse, à la mesure du mois et parfois de la journée. Sa croissance est sans fin et sans frein.

« Jamais l'histoire humaine n'a connu une telle accélération technologique. La puissance de calcul mobilisée par les modèles d'IA double tous les six mois. En 2025, le projet Stargate incarne cette ambition titanesque. » (Le Point, 29/10/2025) L'objectif américain : déployer d'ici à 2030 l'équivalent en consommation énergétique de 7 centrales nucléaires.

Dans certaines tâches, le gigawatt devient la nouvelle unité de mesure de l'intelligence artificielle. Un gigawatt, c'est à peu près l'énergie qu'il faut à un réacteur de centrale nucléaire, soit la consommation annuelle de 1,3 million de Français. Gilles Babinet observe que les États-Unis concentreraient déjà entre 45 et 60 gigawatts de nouveaux projets. Face à cette démesure, la compétition avec Pékin s'intensifie avec cinq mégastructures, sous l'égide du programme Dong Shu Xi Suan (50 gigawatts).
Zuckerberg annonce : « Nous investirons massivement ». Google réplique, dans la foulée, par un investissement de 250 milliards, Microsoft évoque 75 à 80 milliards de dollars. Trump se réjouit et son homologue chinois Jinping fait de même, car tous deux pensent redessiner la carte de la puissance en créant un nouveau monde.
Meredith Whittaker y voit la réplique d'un ordre économique déjà ancien : « L'IA est la continuation du modèle économique des Big Tech. » Pour elle, trois acteurs américains – Microsoft, Amazon et Google – contrôlent 70 % du cloud mondial : les start-up doivent faire appel à eux et leur confient leurs données, qui permettent ensuite aux IA de se perfectionner. « L'IA n'est pas un progrès neutre, mais un projet de pouvoir. »

Le monde s'emballe pour le pouvoir, mais sans se donner le temps de la réflexion. Même Elon Musk disait : « Je pense que nous devrions être très prudents. Avec l'intelligence artificielle, nous invoquons un démon. » L'entrepreneur Tarik Krim (Le Point, 29/10/2025), prévient lui aussi : « L'IA pourrait remplacer la totalité des capacités cognitives, c'est pourquoi chacun veut y arriver le premier. » Dans le même temps, les besoins en énergie explosent : alors que nous fêtons les dix ans de la COP21, l'intelligence artificielle connaît une croissance explosive qui transforme le paysage énergétique.
Si une requête ChatGPT consomme désormais autant qu'une recherche Google, les centres de données IA représentent pourtant 2 % de la consommation électrique mondiale, et cette part pourrait quadrupler d'ici 2030. L'entraînement des modèles d'IA reste cependant l'étape la plus énergivore, nécessitant des milliers de MWh, soit l'équivalent de plusieurs petites villes par modèle (MISTER IA, Thomas Pasturel).

Or, si nous prenons l'usage du numérique dans son ensemble, les estimations récentes situent le numérique entre 6 et 10 % de la consommation énergétique mondiale (Cf. The Shift Project 2021).

En chiffre brut, ceci est l'équivalent de :

  • Plus de la totalité du transport aérien mondial (qui pèse plutôt 2–3 %).
  • Plus que la consommation annuelle des 202 millions de foyers européens réunis (environ 2–3 % également).

Si le numérique consomme ~8 %, les voitures sont à 12 %. Selon un autre article du Point (21/10/2019), le numérique mondial est cinq fois plus gourmand que le parc automobile français. Mais ce qui est à craindre, c'est la progression importante du numérique, qu'il est difficile de mesurer. En 2024, la consommation mondiale d'énergie a crû deux fois plus vite que la moyenne des dix années précédentes. Les études ADEME et ARCEP prévoient que l'IA génère 50 millions de tonnes de CO2 en 2050 en France, soit trois fois plus qu'aujourd'hui. Les datacenters d'intelligence artificielle sont particulièrement énergivores, avec une consommation électrique 4 à 5 fois supérieure à celle d'un datacenter traditionnel. 35 sites dédiés à l'IA ont été annoncés par le gouvernement français (Sommet sur l'IA).

Que faire, que penser ? Le Vatican a alerté le monde sur la question des technologies numériques, de l'intelligence artificielle (IA) et de leur impact énergétique, dans une logique de « soin de la maison commune ». « Les modèles d'IA actuels et le matériel requis pour les soutenir consomment d'énormes quantités d'énergie et d'eau, contribuant de manière significative aux émissions de CO2 ».

Comment penser l'avenir autrement, pour un monde plus juste et moins énergivore ? « Puisque ce qui mesure la perfection des personnes, c'est leur degré de charité, et non la quantité de données et de connaissances qu'elles peuvent accumuler », la manière dont l'intelligence artificielle est adoptée « pour inclure [...] les frères et les sœurs les plus faibles et les plus nécessiteux, est la mesure révélatrice de notre humanité » (Antiqua et nova).

À retenir
  • Le 21 janvier, Donald Trump a réuni à la Maison-Blanche les grands patrons de l'IA et du numérique, pour annoncer le lancement de Stargate, son mégaprojet d'infrastructures dédiées à l'IA.

  • Pour fournir en énergie les projets américain et chinois uniquement, il faut construire l'équivalent de 14 centrales nucléaires d'ici 2030.

  •  « L'IA n'est pas un progrès neutre, mais un projet de pouvoir. »

  • Si le numérique consomme ~8 %, les voitures sont à 12 % : en 2019, le numérique mondial est cinq fois plus gourmand que le parc automobile français et ne cesse de progresser rapidement.

La sélection
Superintelligence (ASI) : dernière frontière de l'IA, entre rêve lointain et dystopie
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