
Fin de vie : la stratégie offensive des partisans de l'euthanasie
L'examen en séance publique des textes sur « la fin de vie » et « les soins palliatifs et d'accompagnement » a commencé à l'Assemblée nationale le 12 mai. Un vote solennel est prévu le 27 mai. Pour éviter la confusion entre les deux sujets, le premier ministre François Bayrou a choisi de traiter le thème de la fin de vie en deux propositions de loi – l'une sur les soins palliatifs, l'autre sur l'« aide active à mourir ». Mais les députés pro-euthanasie ont quasiment aboli cette frontière en obtenant l'examen simultané des deux textes. De fait, en commission, les amendements stipulant qu'on ne saurait établir de « continuum entre les soins palliatifs et le suicide assisté » ont tous été repoussés...
Le « droit à mourir » c'est-à-dire à l'euthanasie (mais la proposition de loi n'utilise jamais ce mot) est une des promesses du président de la République. Elle est soutenue par des membres du « bloc central », dont la présidente de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet, qui plaide pour l'aboutissement à un « texte d'équilibre » (Le Monde, 12/05/2025). Au gouvernement, elle est portée par Catherine Vautrin, la ministre de tutelle pour le Travail, la Santé, les Solidarités et la Famille. D'autres n'y sont pas favorables, tel le ministre de la Santé et de l'Accès aux soins, Yannick Neuder, un médecin. Voulue par François Bayrou, la présence conjointe de ces deux ministres dans l'hémicycle pour être la voix du gouvernement est une tactique typique du « en même temps » macronien.
Dès le premier jour des débats, il est apparu clairement que Catherine Vautrin, ministre de tutelle, était à la manœuvre. Pour obtenir l'adhésion d'une majorité de députés à « l'aide active à mourir », elle a fait amender le texte initial : « Plutôt qu'un libre choix entre euthanasie et suicide assisté , la ministre souhaite (...) faire de «l'auto-administration» de la substance létale par le patient la règle » rapporte Le Figaro (12/05/2025). L'amendement du gouvernement a été approuvé le 17 mai. Le but est de contourner l'aversion des médecins à pratiquer une euthanasie. Mais qui délivrera cette substance létale ? Et qu'adviendra-t-il au médecin ou au pharmacien qui contesterait cette demande en invoquant l'objection de conscience ? « C'est une première victoire pour les partisans du texte » constate RFI (18/05/2025) : « Les élus approuvent la possibilité pour une personne qui en exprime la demande d'avoir recourt à une substance létale, autrement dit de choisir de mourir ».
La porte est donc ouverte à la légalisation de l'euthanasie soutenue par le rapporteur Olivier Falorni (app. MoDem). Le texte qu'il défend propose la mort programmée à tout patient « atteint d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause, qui engage le pronostic vital, en phase avancée ou terminale ». Selon lui, « il y a encore pire que la mort, quand la vie n'est devenue qu'une inexorable agonie. »
C'est précisément pour éviter que l'agonie (c'est-à-dire, selon l'étymologie grecque, le combat auquel chacun est confronté en fin de vie) soit « pire que la mort » qu'il faut développer les soins palliatifs. Or l'examen de la première proposition de loi a mis en lumière que seule la moitié des besoins serait pourvue.
Le corps médical est majoritairement opposé à « un droit de donner la mort » qui, une fois revêtu du sceau de l'État aurait tôt fait de s'imposer comme une obligation : « L'impossibilité de donner la mort, c'est un principe absolu », a déclaré le député Philippe Juvin (LR), professeur de médecine et anesthésiste. Outre la violation d'un principe fondateur depuis des millénaires (le serment d'Hippocrate qui proscrit l'euthanasie remonte au IVe siècle av. J.C), le professeur Juvin estime que ce texte « ouvre l'euthanasie à des personnes qui ont potentiellement plusieurs années à vivre ». Dans Valeurs Actuelles (15/05/2025), il ajoute : « La loi fin de vie risque de s'appliquer principalement aux gens qui sont pauvres et seuls » – les moins dépourvus trouvant les moyens d'accéder aux trop rares unités de soins palliatifs.
La stratégie des partisans du « droit à mourir » a été dévoilée par eux-mêmes, rapporte le JDD (18/05/2025) : « Lors d'une réunion publique (...) le 30 novembre 2024, le [ex] député [Jean-Louis Touraine] (...) expose très librement sa feuille de route : « Il faut obtenir le plus possible (...) et (...) une fois qu'on aura mis le pied dans la porte, il faudra revenir tous les ans et dire qu'on veut étendre ça [aux mineurs et aux malades de toute forme de maladie]. » C'est aussi le plan de l'Association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD) qui déclarait en septembre 2022, dans un courriel adressé à ses adhérents : « Nous devrons accepter des concessions qui ne seront que temporaires, transitoires. Car dès lors que le principe même de l'aide active aura été voté, le front des anti-choix aura été brisé et nous pourrons enfin avancer rapidement et faire évoluer la loi vers ce que nous souhaitons tous : une loi du libre choix qui ne comporte aucune obligation pour quiconque. » Une tactique décryptée dans les « dix pièges de la loi fin de vie » qu'énumère l'association Alliance Vita (16/05/2025, en lien ci-dessous).