Sciences

Adieu, Voyager 1 !

Par Ludovic Lavaucelle - Publié le 06/05/2024 - Photo: La sonde Voyager 1 dans l'espace (Shutterstock).
La sonde spatiale Voyager 1, lancée en 1977, est en train de quitter le système solaire pour un voyage sans retour... À l'heure où la sonde devrait bientôt arrêter de communiquer avec la Terre et pénétrer les confins interstellaires, retraçons l'exploit scientifique derrière ce périple.

Elle va bientôt disparaître dans l'espace intersidéral… Cela fait presque 50 ans que la sonde spatiale Voyager 1 s'éloigne sans bruit de la Terre. Lancée le 5 septembre 1977, elle est aujourd'hui à plus 24 milliards de kilomètres. C'est l'objet d'origine humaine le plus éloigné de ses concepteurs et depuis la fin de l'année dernière, il donne des signes de faiblesse. Les ingénieurs de la NASA viennent de remonter l'origine des transmissions incohérentes reçues depuis quelques mois : un micro-processeur qui flanche. Rien de surprenant après une telle odyssée et des services inestimables rendus à l'astronomie. Petit miracle néanmoins, alors que la communauté scientifique préparait son épitaphe, Voyager 1 vient tout juste – le 20 avril - d'envoyer des informations intelligibles sur l'état de santé de ses systèmes ! Les ingénieurs de la NASA ont réussi à réparer un bug informatique et ils n'excluent pas de remettre en route les outils scientifiques embarqués… On a allégé les tâches de cette petite bête de somme à partir de 2020 à cause de l'affaiblissement de sa source d'énergie électrique : Voyager 1 a quitté l'héliosphère en août 2012. Elle se taira probablement en 2025… Mais Voyager 2, qui a quitté le système solaire en 2018, soit 6 ans après sa sœur aînée, continue d'envoyer des informations scientifiques régulièrement à sa base terrestre.

Utilisons la vitesse de la lumière – la plus véloce des voyageuses — comme échelle car le parcours de la sonde donne le tournis… Il faut à la lumière un peu plus d'une seconde pour atteindre la lune et près de 4 heures pour dépasser Neptune, la plus distante des planètes de notre système solaire. Mais pour toucher le métal de Voyager 1, plus de 22 heures sont désormais nécessaires… C'est le temps que met un message émis par la sonde pour atteindre sa base. Les sœurs jumelles Voyager 1 et Voyager 2 ont été lancées en 1977 pour profiter d'un rare alignement des planètes. Elles ont accompli des merveilles comme la découverte des lunes de Jupiter, Saturne et Neptune et ont renvoyé à leurs concepteurs des photos sensationnelles. Parmi les chefs d'œuvre de Voyager 1 : la photographie (« Pale blue dot ») de la Terre prise à une « altitude » de 6,4 milliards de kilomètres en 1990 rappelle David Whitehouse pour The Spectator (voir l'article en lien).

Voyager 1 (et sa suivante Voyager 2) ont entamé une nouvelle étape d'un voyage sans retour dans l'immensité spatiale. D'où se trouve Voyager 1 en ce moment, le Soleil est encore l'étoile la plus brillante mais les planètes qui gravitent autour sont à peine visibles. La sonde n'est pas encore libérée tout à fait de la gravité de l'astre solaire. Malgré une vitesse de 15 km à la seconde, il lui faudra encore 50 000 ans (un clignement d'œil cosmique) pour voir Sirius – la plus brillante des étoiles dans notre ciel nocturne – remplacer le Soleil. Voyager 1 emporte un message : un disque en or contenant des images, des sons de la planète Terre. L'appel des baleines, le son d'un baiser, d'un orage, des extraits de Bach et de Beethoven, des chants de peuples dits « primitifs ». Il a été question d'inclure « Here comes the sun » des Beatles mais les droits exigés par EMI, la maison de disque du groupe, ont été jugés exorbitants. Comme quoi, on peut trouver plus de poésie chez les ingénieurs que chez les impresarios d'artistes… Il y a aussi les silhouettes d'un homme et d'une femme – des images très prudes. Le projet initial était d'inclure des images détaillées de l'anatomie humaine. Mais les puritains de Washington ont réagi avec virulence en exigeant d'exclure toute nudité explicite. Imaginez que l'image tombe sous des yeux extra-terrestres non avertis ! De quoi risquer de saboter tout dialogue intersidéral pour des millénaires…

L'informatique embarqué – datant des années 70 – fonctionne encore avec une prouesse : les ingénieurs ont réussi à reprogrammer les systèmes pour compenser la perte de mémoire endommagée par les rayons cosmiques. La source d'énergie électrique va perdurer encore quelques années – il est néanmoins probable que l'ordinateur finisse par se taire dans les mois qui viennent. Dans 50 000 ans, Voyager 1 pénétrera dans le système de Sirius… À quoi ressemblera notre bonne vieille Terre alors et quels seront les paysages spatiaux défilant autour de la sonde ? En 1977, un message du Président Jimmy Carter avait été inclus en dernière minute et se terminant ainsi : « … Nous essayons de survivre à notre temps pour vivre dans le vôtre… »

La sélection
Farewell, Voyager 1
Lire l'article sur The Spectator
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Le 13/05/2024 à 10:56
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Le 13/05/2024 à 10:55
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