Un scandale de 100 millions de dollars révèle la corruption gangrénant l'Ukraine
Une cuvette en or massif... C'est ce que les enquêteurs ont trouvé dans les toilettes de l'appartement de Timur Mindich, un homme d'affaires à la double nationalité israélo-ukrainienne, qui est un ami très proche du président Volodymyr Zelenski. Alors que l'Ukraine est sous une intense pression – entre le marteau des avancées militaires russes et l'enclume des négociations de paix –, ce scandale fragilise grandement son gouvernement. L'opération « Midas » – c'est le nom de l'enquête menée par le Bureau national anticorruption ukrainien (NABU) depuis 15 mois – a mis à jour un système massif de détournements d'argent public par des pots-de-vin. La société au centre de l'affaire est Energoatom. Elle fournit aujourd'hui près de 70 % de l'électricité à la population ukrainienne, compte tenu des dommages causés par la guerre sur les autres fournisseurs. Des contrats massifs ont été conclus pour protéger les 4 centrales nucléaires (15 réacteurs) de possibles attaques russes. Or, 10 % à 20 % de la valeur de ces contrats ont été reversés à des proches de Volodymyr Zelenski et à des membres du gouvernement de Kiev. Outre Timur Mindich, plusieurs personnages de premier plan sont tombés. Les écoutes téléphoniques montrent qu'ils s'affublaient de noms de code parfois loufoques (comme Carlson, personnage de dessin animé populaire en Ukraine pour Mindich). Et ils se passaient des monceaux de liasses de dollars dans des grands sacs. L'un des protagonistes mis sur écoute se plaignait d'ailleurs de douleurs dorsales dues au poids des sacs... Oleksiï Tchernychov, l'ex-vice-premier ministre, est accusé d'avoir détourné 1,3 million de dollars. Herman Halouchtchenko, ex-ministre de l'Énergie et de la Justice : contraint à la démission. Pareil pour Svitlana Hryntchouk, ministre de l'Énergie... Enfin, le très influent chef de cabinet de Zelenski – Andriy Yermak – a été limogé, alors qu'il a joué un rôle central dans les pourparlers de paix...
Le président Zelenski s'est empressé d'intervenir auprès de ses compatriotes pour annoncer ces départs et montrer qu'il prenait des mesures. S'il n'est pas visé à ce stade par l'enquête, le scandale est extrêmement gênant, car il touche des collaborateurs très proches. Il veut aussi sauvegarder le soutien des pays européens en démontrant qu'en Ukraine, une commission d'enquête indépendante peut effectuer son travail et mettre en cause les puissants. Mais sa position est très délicate, car il avait lui-même signé un décret en juillet dernier pour limiter le pouvoir des enquêteurs anticorruption. Les Ukrainiens étaient descendus dans la rue, révoltés par cette mesure, et il avait dû revenir sur sa décision. La population est ulcérée par le scandale, alors que des centaines de milliers d'hommes sont morts au combat et que la majorité des Ukrainiens peinent à se chauffer. Des gens très haut placés ont volé l'argent destiné à protéger des infrastructures essentielles. Ces mêmes personnalités qui n'hésitent pas à pourchasser dans la rue les récalcitrants à la conscription, tout en envoyant leurs propres fils ou ceux de leurs amis à l'étranger vivre une vie de luxe. Et que dire de la fuite de Timur Mindich ? Aujourd'hui réfugié en Israël, il a pu passer les frontières d'un pays en guerre sans problème. Il a été déchu de sa nationalité ukrainienne. Le pouvoir politique de Zelenski est donc très fragilisé par cette affaire, lui qui exerce le pouvoir depuis le début du conflit entouré de ces très proches. La concentration des pouvoirs à Kiev pose évidemment question après l'annulation d'élections présidentielles à cause de la guerre, en mars 2024, et leur report sine die. Les Ukrainiens ne font plus confiance à leur gouvernement, et 69 % d'entre eux désirent la fin du conflit.
Le dévoilement de cette affaire, alors que les négociations de paix sont sous tension, n'est sans doute pas une coïncidence... « NABU » – le bureau national anticorruption ukrainien – n'est pas tout à fait indépendant : des agents du FBI américain y sont présents. D'aucuns verraient dans les révélations un outil permettant à Washington d'obliger Zelenski à se soumettre au plan de paix. Ce scandale projette une image peu reluisante de l'Ukraine, car il n'est certes pas le premier. De lourds soupçons pèsent sur les ventes d'armes. Déjà, en janvier 2024, le SBU (services secrets ukrainiens) avait découvert une tentative de détournement sur des achats de munitions pesant 40 millions de dollars. Des fonctionnaires du ministère de la Défense ukrainiens avaient été mis en cause. Depuis 2022 et les ventes d'armes massives, la traçabilité des transactions et des livraisons reste problématique... Les services américains semblent parfaitement informés des affaires de corruption et la chronologie du scandale, déjà surnommé « Golden toilet », démontre qu'ils entendent l'utiliser dans le cadre des négociations de paix. Le président Macron vient quant à lui de recevoir Zelenski, en refusant de « donner des leçons » à l'Ukraine. L'U.E. vient d'ailleurs de lui confirmer une aide supplémentaire de 6 milliards d'euros...
- 100 millions de dollars détournés par des membres du gouvernement ukrainiens et des proches du président Zelenski.
- Le FBI a un bureau au sein de la NABU (la commission anticorruption ukrainienne).
- Avec des centaines de milliers de soldats morts, la population ukrainienne est ulcérée : 69 % désirent la paix (sondage Gallup d'août 2025).
- Ce scandale révèle l'importance de la corruption en Ukraine, avec des ramifications internationales.