Lancement du James Webb Space Telescope (JWST)
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Lancement du James Webb Space Telescope (JWST)

Par Janus Maat - Publié le 27/12/2021
100 fois plus puissant que Hubble, 6 mètres 50 d’envergure, mis en orbite à plus de 1,5 million de kilomètres de la Terre, soit quatre fois la distance Terre-Lune, sur une trajectoire atteinte en 30 jours : cette nouvelle planète artificielle du système solaire s’appelle le télescope spatial James Webb (James Webb Space Telescope ou JWST en anglais), et il aura fallu développer des trésors d’ingéniosité pour pouvoir plier ses 18 miroirs dans le nez d’Ariane V qui l’a lancé le 25 décembre 2021 à 13h20 heure de Paris, 9h20 heure locale.

Sa position dans l’espace est très précise, et porte même un nom : point de Lagrange L2, du nom du fameux physicien français de la fin du XVIIIème siècle. C’est un point dans l’espace où les effets gravitationnels de la Terre et du Soleil se combinent parfaitement pour permettre au satellite de voguer sur une trajectoire le protégeant des flots de particules dangereuses provenant du Soleil, la Terre et 5 couches de polymères – chacune fine comme un cheveu – servant de bouclier tout en le gardant suffisamment froid. Si vous êtes perdu, pour le situer votre GPS ou Google Maps ne vous seront pas d’une grande utilité. La 5G ne capte pas à une telle distance. Il vous faut partir du Soleil et prendre la direction de la Terre. Ne vous y arrêtez pas, continuez 1,5 million de kilomètres, et vous y êtes. JWST accompagnera notre planète sur son orbite pendant environ 10 ans, gardant toujours la même distance entre lui et nous, ce qui permettra des prises de données dans la durée. Un très long temps de pose sous haute protection, qui lui permet d’avoir une précision telle qu’il peut observer l’équivalent d’une pièce de 5 centimes à 50 kilomètres de distance.

Une fois mis en service, grâce à sa sensibilité aux longueurs d’onde infrarouge, ce concentré de technologie nous fournira les images les plus précises et lointaines du ciel jamais captées. Cette gamme de longueurs d’onde permet en effet d’observer des objets froids comme l’atmosphère des planètes, les gaz interstellaires, ou des galaxies extrêmement lointaines dont la lumière s’est « refroidie » avant d’arriver jusqu’à ses miroirs. Cette lumière si précieuse et si lointaine, contenant autant d’informations fondamentales, est difficile à observer avec des télescopes traditionnels, aussi élevés en altitude soient-ils, parce qu’elle est complètement absorbée par l’atmosphère terrestre. Il n’y avait donc pas d’autre alternative pour scruter notre galaxie et ses grandes sœurs, aujourd’hui disparues, que d’envoyer l’instrumentation dans l’espace, et le plus loin possible de la Terre afin d’éviter toute interférence.

Le gros avantage de ces lumières infrarouges, c’est qu’elles passent au travers des poussières interstellaires facilement. Ceci est très utile pour analyser la naissance des planètes ou des étoiles, qui sont souvent accompagnées d’épais nuages de poussières, empêchant de voir au travers avec des télescopes de type Hubble, qui ne peuvent observer que la lumière visible. JWST sera donc capable de percer le cœur des étoiles et de comprendre les mécanismes de formation des planètes. En observant en détail ces exoplanètes, le JWST sera capable d’analyser l’atmosphère, en déduire sa composition, la température qui y règne, voire même distinguer la présence de nuages, et pourquoi pas, de formes organiques prémices de présence de vie.

Mais observer l’infrarouge c’est aussi remonter dans le temps grâce à un effet appelé « décalage vers le rouge ». La lumière très énergétique, émise d’étoiles il y a des milliards d’années, a tendance à perdre de l’énergie au cours de son voyage à cause de l’expansion de l’Univers. Ainsi, une lumière émise bleue nous arrivera rouge, et une lumière émise rouge nous arrivera infrarouge. Imaginons maintenant une étoile qui s’est formée il y a 13 milliards d’années, avec de la lumière tout ce qu’il y a de plus visible, mélangeant du bleu, du vert et du rouge. Durant son voyage de 13 milliards d’années vers nous, par la magie de l’expansion sa lumière sera devenue infrarouge, et visible par JWST qui sera alors capable de donner une photographie du ciel tel qu’il était il y a près de 13,6 milliards d’années, lorsque les premières galaxies ont commencé à se former, soit 200 millions d’années après le Big Bang, alors que notre Univers était encore tout bébé. On peut même rêver de prendre en photo l’apparition des toutes premières étoiles.

JWST sera aussi capable de percer le cœur des galaxies, notamment les trous noirs supermassifs au centre de certaines d’entre elles, où des phénomènes ultra-violents de jets de particules émettent de la lumière qui parviendra sous forme infrarouge jusqu’aux miroirs du télescope, nous donnant des informations fondamentales sur la formation même des galaxies, et pourquoi pas de leur trou noir central.

Il faudra patienter avant de recevoir la première image de ce bijou de technologie, mais en attendant nous pouvons regarder le ciel, quand le soir est dégagé, en rêvant à cet océan cosmologique de mondes multiples qui n’attendent qu’à être découverts...
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Lancement du James Webb Space Telescope (JWST)
Le télescope spatial James Webb et l'instrument MIRI
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