Écologie

Le développement de l'éolien en France freiné par le Conseil d'État

Par Philippe Oswald - Publié le 03/04/2024 - Photo : Des techniciens et des visiteurs sur un chantier du parc éolien de Souleilla-Corbieres à Treilles, dans le sud de la France, le 1er juin 2023. (Raymons Roig/ AFP)

Les nuisances sonores émises par les éoliennes étaient depuis longtemps une pomme de discorde entre des habitants proches de leurs implantations et les acteurs de l'éolien. Les premiers reprochaient aux seconds d'avoir établi un protocole d'évaluation minimisant ces nuisances dont ils subissaient les effets. Portée devant le Conseil d'État par 16 associations soutenant des riverains d'éoliennes dans toute la France, l'affaire a connu un dénouement victorieux pour les requérants : le 8 mars dernier, un arrêt du Conseil d'État a annulé le protocole d'évaluation des nuisances sonores provoquées par les éoliennes. « Le Conseil d'État a annulé l'ensemble des dispositions concernant les trois versions successives du protocole de mesure de nuisances sonores censé protéger la santé des riverains », précise le site de la Fédération Environnement Durable (FED) en lien ci-dessous.

Une décision « historique » , selon le JDD du 12 mars qui a révélé l'affaire au grand public. Elle émane en effet de « la plus haute cour de justice française » — du moins de l'ordre administratif, la Cour de cassation étant la plus haute juridiction de l'ordre judiciaire. (Le Conseil d'État créé par Napoléon Bonaparte en 1799, ne rend pas seulement des avis juridiques au gouvernement et au Parlement mais juge les litiges entre les citoyens et l'administration).

« C'est une victoire ! » se félicite Fabien Bouglé, auteur notamment de La face noire de la transition écologique aux éditions du Rocher, et figure de proue des opposants au éoliennes. Au micro d'Europe 1 (15 mars), il a rappelé en préalable que la décision du Conseil d'État ne concerne que la pollution sonore, celle que l'on entend, et non les infra-sons, c'est-à-dire les vibrations inaudibles (mais qui peuvent être néfastes). « Par sa décision, explique-t-il, le Conseil d'État a rendu caduque le protocole de mesure des nuisances sonores des éoliennes développé et imposé par les entrepreneurs de l'éolien eux-mêmes ». « Cette décision concerne non seulement les autorisations et les projets en cours, mais pourrait également remettre en cause les parcs éoliens existants » ajoute le communiqué de la FED.

À l'origine de l'affaire, un homme, Fabien Ferreri, habitant du village normand d'Échauffour (Orne), qui bataillait depuis des années contre l'installation d'éoliennes à près de 500 mètres de sa maison. Il se plaignait notamment de nuisances sonores. Avec le comité de riverains qu'il préside, Fabien Ferreri avait d'abord obtenu du sous-préfet en 2021 l'arrêt des éoliennes la nuit parce que leur bruit excédait les mesures réglementaires alors en vigueur. Mais la filière éolienne avait demandé de changer les protocoles de mesures en sa faveur… et avait obtenu satisfaction du gouvernement. Les éoliennes d'Échauffour avaient donc repris leur activité nocturne. Afin de contrer cette modification réglementaire qui laissait de côté l'avis des riverains, Fabien Ferreri avait repris le combat en mobilisant de nombreuses associations pour saisir le Conseil d'État. « Grâce à cette décision, se réjouit Fabien Ferreri, nous allons pouvoir discuter d'une nouvelle réglementation qui prenne en compte l'avis des riverains subissant les nuisances des éoliennes. » En attendant, c'est l'ancienne réglementation qui redevient la norme. Les projets de parcs d'éoliennes en instruction ou autorisés mais non encore construits devront « impérativement refaire une évaluation environnementale complète » souligne la FED. Quant aux parcs éoliens existants, ajoute la FED, ils « ne devraient normalement plus être autorisés à fonctionner en l'état. »

D'autres nuisances environnementales, écologiques, sanitaires et économiques, dénoncées dans les pays européens et particulièrement en France, compromettent le développement de l'éolien (cf. LSDJ « Gros temps pour les éoliennes » 20/9/2023). Ce ne sont pas seulement les parcs terrestres d'éoliennes qui sont contestés mais les parcs marins, comme le rapporte Ouest-France (16 mars) à propos de la carte des nouvelles « zones propices » au développement de l'éolien en mer sur la zone Nord-Atlantique-Manche que l'État vient de présenter aux élus locaux et « qui cristallise déjà l'hostilité ».

La sélection
Conseil d’État : Annulation historique des autorisations éoliennes, impact crucial sur l’avenir énergétique français
Lire le communiqué sur le site de la Fédération Environnement Durable
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