Court-circuit majeur à General Electric
Économie

Court-circuit majeur à General Electric

Par Philippe Oswald - Publié le 22/08/2019
Relayée le 15 août par le Wall Street Journal, la nouvelle - une bombe ! - a fait dévisser en bourse le géant américain General Electric (GE) au cœur de l’été. GE camouflerait 38 milliards de dollars (34,3 milliards d'euros) de pertes potentielles, selon le lanceur d’alerte américain Harry Markopolos. Au début des années 2000, cet expert-comptable avait été l'un des premiers à dénoncer aux autorités financières les activités frauduleuses de la société de Bernard Madoff (qui purge depuis 2009 une peine de 150 ans de prison…) Selon l’étude publiée par Markopolos, GE serait insolvable, et le besoin de fonds de roulement cumulé de ses activités industrielles atteindrait 20 milliards de dollars. « Spéculations sans intérêt, malintentionnées et intéressées » a répliqué GE, son PDG, Lawrence Culp, dénonçant une « manipulation de marché pure et simple ». GE pointe le pourcentage des profits que Markopolos réaliserait grâce à son étude, via un fonds d’investissement qui mise sur la chute de l'action GE (ce que le lanceur d’alerte ne nie pas).

« La fraude comptable de 38 milliards de dollars de GE représente plus de 40% de la capitalisation boursière de GE, ce qui la rend bien plus grave que les fraudes comptables d’Enron ou de WorldCom », estime Harry Markopolos qui prédit que la firme américaine déposera son bilan au plus tard en 2020. Il déclare avoir transmis son étude à la Security Exchange Commission (SEC), l’autorité des marchés aux Etats-Unis, qui effectue déjà des contrôles de la comptabilité de GE, parallèlement au département américain de la Justice. Les accusations de Markopolos ont déclenché un virulent tir de barrage de vedettes de la communauté financière américaine. Mais que GE ait ou non cherché à dissimuler d’énormes trous de trésorerie affectant surtout ses activités d’assurance-santé, le fait est que le groupe industriel et financier est lourdement endetté : près de 92 milliards de dollars (82,8 milliards d'euros). Au moins 95% du déficit de GE viendraient de ses déboires dans l’assurance-santé où il s’est imprudemment aventuré en tant que groupe financier. En tant qu’industriel, GE doit aussi affronter la baisse des commandes de turbines à gaz et les conséquences sur ses livraisons de moteurs de la catastrophe industrielle que subit Boeing avec ses 737 MAX (interdits de vol depuis la mi-mars).

GE a annoncé un plan de suppression de près de 10 000 postes dans le monde. En France, sur ses sites de Belfort et en Bourgogne, le groupe prévoit la suppression d'un millier d'emplois. C’est précisément le nombre d’emplois que GE s’était engagé à créer lorsqu’il avait acquis la branche Energie d’Alstom en 2015 (pour cette promesse non tenue, une amende de 50 millions d'euros a été infligée à GE). L’autre engagement de General Electric, le maintien du centre décisionnel de la division turbines à gaz à Belfort, semble difficilement compatible avec ce plan de restructuration (« une analyse complexe à mener », reconnaît-on à Bercy). Les syndicats sont sur le pied de guerre : leur mobilisation sera l’un des points chauds de la rentrée. Les conditions de l’acquisition d’Alstom par GE font par ailleurs l’objet d’une enquête dont s’est saisi le Parquet national financier (PNF). Depuis ce rachat calamiteux d'Alstom Energie, 4 PDG se sont succédé à la tête de General Electric.

« Bruno Lemaire serait bien inspiré de profiter du besoin en liquidités de l’entreprise General Electric pour faire une offre de rachat d’Alstom » afin de nous rendre notre indépendance nucléaire, estime Yamine Boudemagh sur le blog de Mediapart (en lien ci-dessous).
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