
Ces « comités Théodule », commissions et agences qui coûtent cher aux Français
L'Agence française de développement (AFD) fait-elle partie des « comités Théodule » ? C'est le sobriquet dont le général De Gaulle affublait les comités et commissions que nos gouvernements créent à l'envi pour se débarrasser d'un problème. Agence d'État et non simple comité ou commission, l'AFD figure en tout cas en bonne place dans le mille-feuille administratif français qui coûte cher pour une efficacité problématique. Dans le cas de l'AFD, c'est encore quand cette agence est efficace qu'elle paraît la plus redoutable.
On peut lire sur le site de l'AFD qu'elle « finance, accompagne et accélère les transitions vers un monde plus juste et durable. Climat, biodiversité, paix, éducation, urbanisme, santé, gouvernance… Nos équipes sont engagées dans plus de 4 200 projets dans les Outre-mer et 150 pays. Nous contribuons ainsi à l'engagement de la France et des Français (sic) en faveur des Objectifs de développement durable (ODD). » Emmanuel Macron avait fait de l'aide au développement un sujet prioritaire de son premier quinquennat. Se souvenant sans doute d'une autre expression du général De Gaulle - « c'est beau, c'est grand, c'est généreux la France ! » - le président de la République avait fait passer l'aide publique française au développement de 10 à 15 milliards d'euros entre 2017 et 2022.
On a appris en février dernier, grâce à l'eurodéputée Reconquête, Sarah Knafo, que le dernier budget annuel de l'AFD s'élève à seize milliards d'euros. Et que parmi les nombreux pays bénéficiaires figure... la Chine, deuxième puissance économique au monde ! Cette fois, surgissant dans la désolation de nos finances publiques, ce lièvre levé par Sarah Knafo ne pouvait passer inaperçu. Le budget de seize milliards d'euros d'aide au développement pour 2025 vient d'être raboté de deux milliards d'euros par l'Assemblée nationale, annonce Le JDD (30/04/2025). « Pour une fois, une bonne nouvelle, un premier pas » s'est réjouie Sarah Knafo sur Europe 1 (30/04/2025), tout en jugeant qu'on reste encore loin des économies nécessaires au sauvetage de nos finances publiques.
Il faudra encore beaucoup de courage et d'efforts pour venir à bout des « comités Théodule », avertit Le JDD (20/04/2025). Ayant créé, début février, une commission d'enquête dédiée à ce « travail herculéen », les sénateurs se sont donné cinq mois pour défricher le maquis des organismes publics et faire la chasse aux inutiles et aux doublons. L'État français, rarement primé sur la scène internationale, mériterait la palme d'or des « comités Théodule » avec au moins 103 agences, 434 opérateurs de l'État et 317 organismes consultatifs. On pourrait d'ailleurs suggérer aux sénateurs de créer un dictionnaire Théodule : rien qu'à la lettre A, on tombe dans une jungle de sigles et d'acronymes : ADEME, AFIT, AFPA, ANCT, ANTAIL, ANS, ASC… De quoi donner une furieuse envie de brandir une tronçonneuse, comme le président argentin ! Mais cela n'entre pas dans les mœurs sénatoriales : « L'idée n'est pas de sortir la tronçonneuse pour tailler dans le vif, souligne [dans Le JDD] Mathieu Darnaud, président du groupe LR du Sénat, mais de détailler le fonctionnement, les compétences et les budgets de ces agents pour les rendre plus efficients (…) et (…) en diminuer le coût. »
Quel coût, au fait ? C'est un mystère bien gardé au ministère de l'Économie et des Finances : « Bercy se montre très opaque et peu coopérant, rapporte [au JDD] un haut responsable du Sénat. « Ses agents n'aiment pas que les parlementaires viennent mettre le nez dans leurs dossiers et dans leurs comptes. » Selon Le JDD, « les estimations du coût global pour le budget varient entre 80 milliards et 107 milliards d'euros par an pour un contingent de plus de 400 000 employés »... qui sont aussi des électeurs. Le gouvernement aura-t-il la volonté et les moyens d'effeuiller ce mille-feuille administratif, pour supprimer les doublons – exemple : l'Agence nationale du sport (ANS), financée par le ministère des Sports pour distribuer des subventions… du ministère des Sports – et des organismes plus coûteux qu'utiles, exemples : l'obscure Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) et l'inénarrable Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), qui se mêle d'expliquer aux Français qu'ils doivent laver leurs sous-vêtements après chaque usage...
Tandis que les sénateurs enquêtent, la commission spéciale de l'Assemblée nationale a entrepris un premier élagage, dans le cadre du projet de loi de simplification de la vie économique. « Au total, une quarantaine de conseils et comités se trouve dans le collimateur de la commission spéciale en charge du projet de loi, liste qui pourrait encore s'allonger à l'occasion de l'examen en séance du texte », avait annoncé Valeurs Actuelles (7 avril). « Mais ne nous emballons pas ! Commençons par obtenir des informations comptables sérieuses auprès des 434 «opérateurs » d'État et leurs cousins, les 24 autorités indépendantes », déclare Pierre Danon, chef d'entreprise et conseiller sur les questions économiques de Bruno Retailleau, au Figaro Magazine (26/04/2025, en lien ci-dessous). À la clé : une économie qu'il évalue à 14,5 milliards d'euros.