Sport

Le sabotage du Tour d'Espagne profite à Pedro Sánchez plus qu'à Gaza

Par Martin Dousse. Synthèse n°2549, Publiée le 17/09/2025 - Photo : La 16e étape de La Vuelta, arrêtée à 8 kilomètres avant l'arrivée en raison de manifestations dans la ville de Mos-Castro de Herville, le 9 septembre 2025.  Crédits : Felipe Carnotto / Anadolu via AFP.
Rarement un évènement sportif aura été tant instrumentalisé. Les manifestants pro-palestiniens ont transformé la Vuelta en caisse de résonance mondiale, pointant un « génocide » d'Israël à Gaza. Pour la première fois dans l'histoire, les coureurs (mis en danger à plusieurs reprises lors de cette édition 2025) n'auront pu rallier l'arrivée d'un grand tour. Le gouvernement espagnol n'a rien fait pour empêcher les troubles. Le Premier ministre socialiste, Pedro Sánchez, les a même ouvertement encouragés.

C'est une première historique, qui risque de devenir un précédent. Le dimanche 14 septembre, les coureurs se sont arrêtés à 60 km de Madrid en raison de énièmes manifestations, qui auront boycotté plusieurs étapes et mis en danger les cyclistes.
Que ceux qui relativisent la violence des chutes en vélo s'intéressent au documentaire Crash (L'Équipe). Ils y découvriront le résultat de chocs à haute vitesse (parfois plus de 70 km/h). Et le champion français Romain Bardet suggérant que les coureurs soient équipés d'un airbag. L'Union cycliste internationale (UCI) dénonçait dans un communiqué l'« intrusion d'individus dans le peloton, jets d'urine et mise en danger des coureurs ayant porté atteinte à leur intégrité physique, certains ayant chuté, subi des blessures et dû abandonner l'épreuve. » Pour plus de précisions, on aurait pu rajouter : tronc d'arbre scié et laissé au milieu de la chaussée, banderole déployée par des manifestants barrant la route au moment du passage du peloton... Le podium final de ce cru 2025, remporté par le danois Jonas Vingegaard, a été improvisé sur des réfrigérateurs portatifs. Ancien champion du monde sur route, le polonais Michal Kwiatkowski résumait bien la situation : « À partir de maintenant, il est clair pour tout le monde qu'une course cycliste peut être utilisée comme une scène efficace pour des protestations, et la prochaine fois ce sera encore pire, parce que quelqu'un a laissé faire et détourné le regard. »

Le Premier Ministre Pedro Sanchez l'a assumé sans ambages. Il a déclaré le même jour de l'arrivée sa « reconnaissance et [son] respect absolus pour les sportifs, mais aussi son admiration pour le peuple espagnol qui se mobilise pour des causes justes comme la Palestine ». Une prise de position que l'UCI a publiquement reprochée à cet ancien joueur de basket universitaire, accusé de politiser le sport. Le gouvernement socialiste espagnol a rétorqué et renchéri, accusant l'UCI de vouloir « blanchir un génocide ». Ce terme – sans nier la catastrophe humaine en cours – fait débat, alors que l'intention génocidaire peine à être établie.
Ces prises de position interviennent alors que le Parti socialiste au pouvoir lançait la campagne des élections locales en Andalousie, région la plus peuplée d'Espagne, aux mains de la droite. Un vrai tremplin vers les élections générales de 2027. Le Premier ministre espagnol compte attiser une cause chère aux Espagnols, dépassant largement le clivage gauche/droite . 82 % des habitants penseraient qu'Israël commet un génocide à Gaza. Après la mort de Franco, Adolfo Suárez avait été le premier dirigeant européen à recevoir Yasser Arafat et à autoriser une représentation diplomatique à Madrid. Quant aux indépendantistes basques et catalans, ils se sentent identifiés à la cause palestinienne.

Pris pour cibles, les coureurs de l'équipe « Israël Premier Tech » ont dû retirer l'appellation de leur combinaison. Les manifestants, soutenus par le ministre des Affaires étrangères, n'ont cessé de réclamer son bannissement de la course, en raison de la proximité affichée du dirigeant de l'équipe avec Benjamin Netanyahou. Une course où « Israël Premier Tech », parmi les formations les mieux classées de la 2e division du cyclisme international (ProTeams), était légalement tenue de participer. L'UCI a réaffirmé sa neutralité politique et refusé de l'exclure (elle avait exclu les formations russes et biélorusses en 2022).
22 policiers ont été blessés lors des manifestations à Madrid. Un gouvernement schizophrène devait maintenir l'ordre tout en encourageant les manifestations. Les syndicats de police se sont plaints également de ne pas avoir reçu les renforts demandés. L'ancien coureur Perico Delgado a été censuré par la télévision espagnole pour avoir critiqué les protestations et l'attitude gouvernementale.
Il faut dire que Pedro Sánchez n'est pas un novice des coups politiques. Il s'est déjà ouvertement renié, promettant qu'il ne pactiserait ni avec la gauche radicale de Podemos, ni avec les indépendantistes catalans. Il a, à chaque fois, trahi sa parole pour être investi, en 2020 et en 2023. Dans un autre registre, la Vuelta 2025 semble aussi être un coup savamment orchestré.

Mais justement, où se trouve Gaza dans tout cela ? Cette manifestation de cynisme politique aura-t-elle rendu service à une cause qui cristallise autant de tensions ? Les habitants exposés aux bombardements israéliens ne voient pas leur quotidien changer. Le gouvernement a-t-il plaidé pour la libération des derniers otages du Hamas et son démantèlement ?
Si un génocide en Palestine avait été blanchi par le déroulé tranquille du très populaire Tour d'Espagne, il était possible de refuser son organisation plutôt que de consentir à mettre les cyclistes et les policiers en péril. Les entrées de liquidités étaient sans doute trop importantes. Là aussi, Michal Kwiatkowski était lucide : « Personnellement, j'aurais préféré qu'on me dise à l'avance que la course était annulée plutôt que de me faire croire que tout allait bien ».

À retenir
  • Le sabotage du Tour d'Espagne a été programmé et encadré par le gouvernement socialiste espagnol.
  • C'est la première fois dans l'histoire qu'un grand tour n'arrive pas à son terme. Les coureurs ont été plusieurs fois mis en danger.
  • 82 % des espagnols considèrent qu'Israël commet un génocide en Palestine, une opinion exploitée par le gouvernement.
  • 22 policiers ont été blessés à Madrid. Ils n'ont pas obtenu les renforts souhaités.
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