Restrictions anti-covid : fin, trêve ou retraite tactique ?
Santé

Restrictions anti-covid : fin, trêve ou retraite tactique ?

Par Peter Bannister - Publié le 19/02/2022
Au moment où de plus en plus de pays commencent à lever les restrictions liées au covid-19, il paraît que nous sommes arrivés à un tournant dans l’évolution de la crise sanitaire. L’idée que le virus serait en train de passer à l’endémicité (présence habituelle), déjà évoquée au mois de janvier par l’Agence européenne des médicaments ainsi que le gouvernement espagnol, semble gagner du terrain. Pourtant, si on fait un tour d’horizon de la gestion de la maladie, la situation reste complexe, avec des écarts considérables entre les stratégies des différents pays. Cela se complique davantage si on veut distinguer entre les aspects sanitaires et socio-politiques de cette gestion, souvent entremêlés. Comme l'a dit récemment le Pr Cyrille Cohen, conseiller au gouvernement israélien pour les vaccins, « si on mélange politique et immunologie [...] on finit par obtenir de la politique ».

La ligne la plus intransigeante au niveau international est sans doute celle de Justin Trudeau au Canada. Face au Freedom Convoy à Ottawa, et malgré la décision de plusieurs états canadiens de lever leurs restrictions contre les non-vaccinés, Trudeau a fait couler beaucoup d’encre en invoquant l’Emergencies Act (état d’urgence), gelant des comptes bancaires et procédant au durcissement des contrôles du crowdfunding, source du financement du convoi. L’opposition parlementaire a crié « dictateur » face aux déclarations de Trudeau, lui rappelant sa déclaration d'admiration de la « dictature » chinoise et de son miracle économique, en 2013. Protestations partagées par plusieurs médecins et scientifiques connus qui ont soutenu les truckers sur le terrain (Paul Alexander, Byram Bridle, Roger Hodkinson), par vidéo (Robert Malone) ou par écrit (23 scientifiques israéliens). Hier, de nombreuses arrestations ont été faites à Ottawa, une vieille dame étant malheureusement piétinée par un cheval de la police.

En Europe, la France semblerait être le seul pays à avoir opté pour une stratégie de confrontation directe par rapport aux contestataires. Les images de véhicules blindées et nuages de gaz lacrymogène à Paris lors de l’arrivée du Convoi de la Liberté ont suscité des interrogations à l’étranger, y compris de la part de figures historiquement de gauche telles que Naomi Wolf. D’autres pays essaient de jongler avec des concessions sur les restrictions au quotidien et une ligne dure sur la vaccination. C’est notamment le cas de l’Italie, où l’obligation vaccinale au-delà de 50 ans vient de rentrer en vigueur, laissant 500 000 personnes sans travail et sans revenus. Le sous-secrétaire de la santé Andrea Costa a déclaré que certains allègements du dispositif (dont la levée du « green pass » - l’équivalent du pass vaccinal français - pour des activités à l’extérieur) pourraient accompagner la fin de l’état d’urgence sanitaire (31 mars), mais que l’obligation vaccinale pourrait rester au-delà de son terme actuel (le 15 juin). L’Autriche poursuit une ligne semblable, ayant décidé de lever la quasi-totalité de ses restrictions à partir du 5 mars, tout en gardant en place l’obligation vaccinale pour l’ensemble de la population adulte, comme une mesure de « moyen à long terme », selon le ministre de la santé Wolfgang Mueckstein, les non-vaccinés étant légalement punissables à partir du 15 mars.

D’autres pays par contre semblent vouloir pencher pour une libéralisation plus franche des restrictions, dont la Grande Bretagne et la Suisse. En Israël, le gouvernement a décidé de supprimer le « passeport vert » à partir du 1er mars, tandis qu'au Danemark, on parle carrément d’arrêter la campagne de vaccination au printemps. La question de la durabilité de toutes ces mesures reste ouverte. Le raisonnement donné par les autorités danoises est que leur pays a déjà atteint un niveau suffisant d’immunité grâce à la vaccination. En même temps, Copenhague reconnaît que les vaccins ont eu peu d’impact sur les infections (très nombreuses) dues à l’omicron. On peut donc se poser la question du niveau de protection donnée par cette couverture vaccinale (qui génère des anticorps dont l’action et la durée sont très différentes de ceux générés par l’immunité naturelle acquise par l’infection) lors de l’apparition d’un nouveau variant hypothétique. Ce qui semble être sûr, malgré les débats sur leur efficacité et sur les effets adverses, c’est que les vaccins actuels n’ont pas conféré l’immunité stérilisante qui seule pourrait mettre une fin définitive à la pandémie.

Ironiquement, on pourrait dire que le vaccin le plus efficace jusqu’à ce jour semble avoir été le variant omicron lui-même, comme a dit Bill Gates hier dans des propos assez surprenants, lors de la conférence sur la sécurité à Munich : « Malheureusement, le virus lui-même – en particulier le variant Omicron – est un type de vaccin. C’est-à-dire qu’il crée à la fois une immunité au niveau des cellules [lymphocytes] B et T, et il a mieux fait le boulot en termes d’atteindre la population mondiale que nous ne l’avons fait avec les vaccins ». Malheureusement pour qui ?
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