Médias

Gabegie et partialité : France Télévisions en accusation

Par Philippe Oswald. Synthèse n°2624, Publiée le 13/12/2025 - Photo : Delphine Ernotte (au centre) lors de la 39e édition du Téléthon, à Saint-Denis, le 6 décembre 2025. La présidente de France TV perçoit une rémunération d'environ 400 000 € brut par an. Crédits : ABACA via Reuters Connect.
Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, a été longuement auditionnée le 10 décembre par la Commission d'enquête parlementaire sur la neutralité et le financement de l'audiovisuel public. Elle a assuré que la neutralité est une « exigence absolue » pour le service public de l'audiovisuel. Le même jour, une vidéo de France Info établissait un lien entre les nazis et les marchés de Noël.

« Savez-vous qu'il existe un lien entre les nazis et nos chers marchés de Noël ? » Ça, alors, pour une nouvelle, c'est une nouvelle ! Ce scoop de France Info en aura étonné plus d'un, le 10 décembre. C'est ainsi qu'était présentée une vidéo intitulée : « Les marchés de Noël, une tradition réhabilitée par les nazis ». Elle sera restée en ligne jusqu'en fin d'après-midi, la direction de Radio France ayant finalement cédé à un déluge de protestations.

France Info croyait faire un bon coup en reliant les marchés de Noël au nazisme en plein Avent. Mais le jour était mal choisi. Ce même mercredi 10 décembre, Delphine Ernotte Cunci, la présidente de France Télévisions, était auditionnée par la Commission d'enquête parlementaire sur la neutralité et le financement de l'audiovisuel public. La présidente « a défendu les "missions essentielles" remplies par la télévision publique. Elle a également assuré des "efforts massifs" menés pour retrouver une situation budgétaire stable, malgré un contexte tendu. [...] Elle a aussi affirmé que le principe de neutralité était une "exigence absolue" pour le service public de l'audiovisuel », rapporte la chaîne parlementaire LCP (10/12/2025).

Cette exigence de neutralité est-elle respectée ? N'y a-t-il pas un soupçon de connivence de l'audiovisuel public avec la gauche socialiste dans l'affaire Legrand-Cohen, de partialité pro-palestinienne lorsque France Info évoque des « otages palestiniens », et un parfum d'anti-christianisme dans la « nazification » des marchés de Noël ? Quelle conception la présidente de France Télévisions se fait-elle de la neutralité quand elle qualifie Cnews de « chaîne d'extrême droite » dans une interview au Monde (18/09/2025)?

Un double soupçon de gabegie et de partialité pèse sur France Télévisions. Il s'appuie sur des chiffres. D'abord un déficit cumulé de 81 millions d'euros pour France Télévisions, selon le rapport accablant que la Cour des comptes a publié en septembre dernier (Public Sénat, 23/09/2025). Face aux députés, le 10 décembre, Delphine Ernotte « a dû répondre à une série de questions percutantes sur sa gestion. Salaires mirobolants, frais d'hôtel luxueux pour le Festival de Cannes, emplois présumés fictifs, liens avec des producteurs financés par des fonds américains… Les sujets sensibles se sont enchaînés », rapporte Le Point (10/12/2025) – sans oublier des questions incisives sur l'impartialité.

Les salaires versés par France Télévisions sont en effet des plus confortables, à commencer par celui de la présidente qui atteint, avec les avantages en nature, 400 000 euros brut par an. « Le cœur du problème réside dans la masse salariale, véritable gouffre pour les finances publiques », dénoncent les Contribuables Associés (23/09/2025). Le salaire moyen à France Télévisions dépasse 71 000 euros brut annuels, bien au-dessus du secteur culturel et de l'audiovisuel privé. Pas de problème de fin de mois : trente et un cadres perçoivent plus de 200 000 euros par an, dont cinq franchissent le cap des 300 000 euros, soit plus de 25 000 euros par mois. Pas de problème de transports : à cela s'ajoutent des véhicules de fonction pour 53 cadres parisiens, des comités d'entreprise disposant de 14,2 millions d'euros, des frais de taxis et de mission à hauteur de quatre millions d'euros en 2024 et des demi-journées de récupération offertes après cinq éditions de JT. » Au total, l'audiovisuel public coûte aux contribuables la bagatelle de 4 milliards d'euros par an, « dont près de 700 millions pour Radio France et ses quelques 5 000 salariés, dont 4 000 permanents. Parmi eux, 800 journalistes seulement, pour près de 750 personnes à des postes administratifs et plus de 450 au management », précise Le Figaro (28/11/2025).

Concernant la neutralité et le pluralisme, rappelons que Delphine Ernotte avait annoncé fièrement sa ligne éditoriale lors d'une précédente audition à l'Assemblée nationale, le 5 juillet 2023 : « Je tiens à dire qu'on ne représente pas la France telle qu'elle est […], mais on essaie de représenter la France telle qu'on voudrait qu'elle soit ». Adèle Van Reeth, la directrice de France Inter, a pour sa part déclaré au Figaro (28/03/2024) : « Les faits, c'est que nous sommes une radio progressiste et que nous l'assumons. » Cette partialité assumée se traduit elle aussi dans les chiffres : selon une enquête de l'Institut Thomas More publiée en mai 2024, les invités des chaînes du service public sont six fois plus souvent de gauche que de droite et les personnalités de droite sont sept fois plus attaquées que défendues. Dans une nouvelle étude de novembre 2025 utilisant l'Intelligence artificielle (IA), l'Institut Thomas More relève que « 47 % des chroniques analysées présentent une orientation clairement marquée à gauche contre seulement 14 % clairement marquées à droite et 38 % de neutre ».

Interviewée par le JDD (09/12/2025, en lien ci-dessous), la députée européenne Reconquête Sarah Knafo juge qu'une privatisation de l'audiovisuel public s'impose d'autant plus que les Français disposent aujourd'hui d'un éventail sans précédent de sources d'information et de culture.

À retenir
  • Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, a été longuement auditionnée le 10 décembre par la Commission d'enquête parlementaire sur la neutralité et le financement de l'audiovisuel public.

  • Elle s'est défendue en mettant en avant des « efforts massifs » pour retrouver un équilibre budgétaire et en assurant que la neutralité est une « exigence absolue » pour le service public de l'audiovisuel.

  • Le même jour, une vidéo de France Info établissait un lien entre les nazis et les marchés de Noël.

  • Selon la Cour des comptes, l'audiovisuel public coûte aux contribuables 4 milliards d'euros par an, qu'ils soient ou non auditeurs et téléspectateurs des chaînes publiques.

La sélection
Le plan de Sarah Knafo pour privatiser l'audiovisuel public
Le JDD
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