La consécration de la Russie et l'énigme de Fatima
Spiritualité

La consécration de la Russie et l'énigme de Fatima

Par Peter Bannister - Publié le 24/03/2022


Demain, dans la basilique St-Pierre de Rome, le pape François consacrera solennellement la Russie et l'Ukraine au Cœur Immaculé de Marie, invitant tous les évêques du monde, les prêtres et les fidèles à se joindre à sa prière pour la paix. Si l’événement a suscité de l’enthousiasme chez de nombreux catholiques, pour d'autres, il ressemble au mieux à un geste pieux mais impuissant face à la réalité sanglante de la guerre, au pire comme à la superstition, aussi ridicule que la croyance que l'ail puisse éloigner le diable.

Pour l’Eglise Catholique, l’acte du Pape n’a pourtant rien d’arbitraire. L'idée de consacrer la Russie au Cœur Immaculé de Marie découle des apparitions de la Vierge à trois enfants (Lucia dos Santos, Francisco et Jacinta Marto) à Fatima au Portugal en 1917. Après la disparition de Francisco et Jacinta lors de la pandémie de grippe espagnole, c'est Lucia, devenue religieuse, qui transmettra la demande (faite lors d’une vision en 1929) de la consécration de la Russie au cœur de Marie par le Pape en union avec tous les évêques du monde. Le 31 août 1941, dans sa communication des "secrets" de Fatima, Lucia écrit que la Vierge avait déclaré en 1917 que "si on accepte mes demandes, la Russie se convertira et on aura la paix ; sinon elle répandra ses erreurs à travers le monde, provoquant des guerres et des persécutions contre l'Église. Les bons seront martyrisés, le Saint-Père aura beaucoup à souffrir, diverses nations seront détruites. À la fin, mon Cœur immaculé triomphera".

Lisant ces mots dramatiques, plusieurs Papes ont tenté de réaliser cette consécration : Pie XII en 1942 et 1952, Paul VI en 1964 et surtout Jean-Paul II le 25 mars 1984. La question de savoir si les conditions stipulées par Sœur Lucia étaient pleinement remplies par le pontife polonais reste âprement débattue. La position officielle de l'Église l’affirme, et cite la chute du mur de Berlin et l'effondrement inattendu de l'Union soviétique comme des fruits de la consécration. D’autres commentateurs soulèvent pourtant des difficultés, notant entre autres que Jean-Paul II n’a pas nommé la Russie en 1984 pour des raisons diplomatiques. Selon cette interprétation, malgré la fin des persécutions religieuses en Russie, le pays ne s'est pas encore "converti" et la paix promise à Fatima ne s'est pas matérialisée (ce qui semble incontestable). En tout cas, il n’est pas surprenant que l'invasion de l'Ukraine le 24 février par les forces russes ait suscité des appels à une nouvelle Consécration, notamment de la part de l’Archevêque de Kiev Sviatoslav Shevchuk, citant la prophétie donnée à Fatima sur la destruction des nations.

Les sceptiques à l'intérieur ou en dehors de l'Église pourraient ici rétorquer que ce serait irrationnel d’espérer la paix en tenant aux seules paroles d'une religieuse portugaise. Tout au long de l'histoire, de nombreuses personnes ont prétendu entendre des messages du Ciel ; même sans poser la question de leur santé mentale, est-ce rationnel de croire à leurs récits, ceux-ci étant par nature invérifiables, relevant de l’expérience subjective ? Au niveau de la logique absolue, cette objection a clairement une certaine force : l'histoire des religions est en effet jonchée depuis toujours de pseudo-mystiques, charlatans et autres exaltés. Cependant, dans le cas de Lucia et des apparitions de 1917, ceux qui soutiennent leur authenticité font appel non seulement à la piété mais aussi à la logique. A Fatima, il ne s’agit pas uniquement d’un récit isolé, mais aussi de phénomènes documentés. Surtout concernant l'apparition finale du 13 octobre 1917, à laquelle assistèrent plus de 30 000 personnes, attirées par l’annonce par les enfants d’un miracle qui aiderait les gens à croire. Nous possédons de nombreux témoignages attestant que d'impressionnants phénomènes (la "Danse du Soleil") se sont alors produits dans le ciel qui restent encore inexpliqués par la science. Ils ont été notés non seulement par des journalistes d’abord hostiles aux apparitions mais aussi à distance par des observateurs sans intérêt particulier pour les événements de Fatima. Ce qui rend l’hypothèse d’une hallucination collective peu crédible.

Pour les athées militants, ces faits sont peu confortables. Entre ceux qui ont saisi leurs implications pour la question de l'existence de Dieu a été le célèbre biologiste Richard Dawkins, vedette du « Nouvel Athéisme ». Essayant de démystifier le récit religieux de Fatima dans son livre Unweaving the Rainbow, il se contente d’affirmer qu'il est impossible que le soleil se soit déplacé (hypothèse que personne n’avance, par ailleurs). Cependant, il n'explique pas pourquoi 30 000 personnes auraient eu simultanément des perceptions aussi extraordinaires à une date annoncée à l'avance avec précision par Lucia, Francisco et Jacinta. Un Luc Ferry pourrait objecter qu'appeler aux miracles pour justifier la foi est un non-sens, mais l'énigme de Fatima nous renvoie néanmoins à la question de base de toute enquête philosophique face à un phénomène : pourquoi y a-t-il quelque chose ici plutôt que rien du tout ?

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Troisième Secret
Le 19/01/2024 à 17:33
Pressentiment que c’était le Saint-Père Dans un entretien avec le Père Jongen en 1946, sœur Lucie lui dit « Nous ne savions pas alors ce qu’était un pape ou un roi » comme le raconte la revue « Médiatrice et Reine » dans son 1 er numéro de mai 1946, cité par exemple dans le « Bulletin Saint Jean-Eudes » n°56 de juin/juillet 2000 ou par De Marchi dans son livre « Témoignage » p 346. Sœur Lucie parle de l’époque des apparitions, de l’été 1917 où elle et ses cousins ont vu et entendu la Très Sainte Vierge Marie à Fatima. D’ailleurs dans son premier mémoire, Lucie raconte que, entre juillet et août 1917, trois prêtres étaient venus les interroger et leur avaient recommandé de prier pour le Saint-Père. Et Jacinthe ne sachant qui était le Saint-Père, les prêtres le leur avaient alors expliqué. Il est donc clair et évident qu’en 1917, qu’en juillet-août 1917, les trois petits voyants ne savaient pas ce qu’était un Saint-Père Et pourtant, dans le texte publié le 26 juin 2000, censé avoir été rédigé en 1944, donc deux ans avant l’entretien avec le Père Jongen, et censé parler des évènements de juillet 1917, nous lisons « Nous avons eu le pressentiment que c’était le Saint-Père » en parlant d’un évêque vêtu de blanc. Comment les voyants ont-ils pu penser au Saint-Père alors qu’ils ne savaient même pas ce que c’était, ce qu’était un Pape ?!? Cela jette un doute, un gros doute sur l’authenticité du texte qui nous a été donné comme étant le « troisième secret » de Fatima ! Infinitif comme seul verbe d’une phrase Le texte qui a été publié le 26 juin 2000 sous le titre « Le troisième secret de Fatima » comporte une syntaxe surprenante, pour ne pas dire erronée : Et nous vîmes dans une lumière immense qui est Dieu : “Quelque chose de semblable à la manière dont se voient les personnes dans un miroir quand elles passent devant” un Évêque vêtu de Blanc, “nous avons eu le pressentiment que c'était le Saint-Père”. Divers autres Évêques, Prêtres, religieux et religieuses monter sur une montagne escarpée. Si nous enlevons toutes les parenthèses (écrites d’ailleurs comme des guillemets ?!?) les deux phrases sont en réalité : Et nous vîmes un Évêque vêtu de Blanc. Divers autres Évêques, Prêtres, religieux et religieuses monter sur une montagne escarpée Le verbe de la deuxième phrase est à l’infinitif : « monter » (ou parfois « gravir ») en français, « subir » en portugais Et les commentateurs déploient des trésors d’imagination pour tenter de minimiser cette erreur d’un infinitif comme seul verbe conjugué dans une phrase. Par exemple le site du Vatican : « (8) Dans la traduction, on a respecté le texte original, même dans les imprécisions de ponctuation, qui n'empêchent d'ailleurs pas la compréhension de ce que la voyante a voulu dire. » Dans le « Nouvel Obs » : « Divers autres Évêques, Prêtres, religieux et religieuses monter (sic) sur une montagne escarpée » Sur le Site « crc-resurrection » : « Plusieurs autres évêques, prêtres, religieux et religieuses gravissaient une montagne escarpée » Sur Wikipédia ou sur le Site « CathoBel » : « [Nous vîmes] divers autres évêques, prêtres, religieux et religieuses monter sur une montagne escarpée » Après avoir médité des heures et des heures sur cette bizarrerie, j’en arrive à la conclusion que la phrase, pour avoir un sens, devait être en réalité : Et nous vîmes un évêque vêtu de blanc, divers autres évêques, prêtres, religieux et religieuses monter sur une montagne escarpée. De cette façon, la phrase a un sens et cela justifie l'infinitif employé pour "monter" sur une montagne. Mais alors comment comprendre que Soeur Lucie ait pu écrire un point puis une majuscule à "divers" comme s'il s'agissait d'une nouvelle phrase, laissant les journalistes dans une grande perplexité ["...et religieuses monter (sic) sur...] Si elle a écrit ce texte en 1944 comme cela est dit, elle avait 37 ans et donc en pleine possession de ses moyens. Tous les textes de l’époque comportent des parenthèses là où il faut des parenthèses et des guillemets aux bons endroits. Les points sont en fin de phrases et les majuscules en début de phrases. Comment se fait-il que pour ce texte, il y ait autant de « imprécisions de ponctuation » pour reprendre l’expression du Vatican ? Une seule explication à mon avis, après avoir retourné le problème depuis des années : Soeur Lucie a écrit ce texte sous la dictée d’un faussaire alors qu'elle n'avait plus toutes ses facultés pour retranscrire ce qu'on lui dictait, ou bien elle l'a fait exprès pour qu'on puisse détecter la supercherie. Mais sûrement pas la mise par écrit d’une soi-disant vision décrite par Sœur Lucie ! Ce texte est donc vraisemblablement, très vraisemblablement un faux !
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