Un homme et un dieu...du 7e art
Culture

Un homme et un dieu...du 7e art

Par Louis Daufresne - Publié le 21/09/2020
21 mai 1996 : les moines de Tibéhirine « disparaissent ». 21 septembre 2020 : Michael Lonsdale les rejoint quelque part sous d’autres cieux. À la veille de ses 80 ans, l’acteur à l’abondante chevelure et à la barbe blanche avait reçu le César du Meilleur acteur dans un second rôle pour son fameux Frère Luc. Des hommes et des dieux de Xavier Beauvois (2010) reste sa dernière apparition marquante. Très peu présents dans le monde de la culture et du cinéma, les cathos aimaient beaucoup Michael Lonsdale, l’adulaient même comme ils savent le faire de grands noms qui font leur coming-out. Le comédien le leur rendit bien. « Ce géant au moelleux vocal stupéfiant » prêta sa voix à d’innombrables documentaires et spectacles engagés (Saint-François d’Assise, Padre Pio, Sainte-Bernadette, les chrétiens de Syrie, etc.) et participa à pléthore de soirées thématiques. Sa stature monumentale offrait une présence douce et rassurante à une population catholique vieillissante et angoissée. Tous ses livres parus depuis dix ans, comme Il n’est jamais trop tard pour le grand amour ou Jésus lumière de vie, mon évangile des peintres, jalonnaient la fin de sa vie de petits cailloux méditatifs. Le tout forme un legs spirituel et artistique d’une grande profondeur et d’une belle qualité d’âme, comme peut en témoigner son éditeur Philippe Rey. Parmi les bons portraits de presse, soulignons celui de Jean-Noël Mirande, paru dans Le Point en 2014. La description qu’il fait du personnage paraît si juste : « Avec son coupe-vent rouge, on dirait le père Noël ou Dieu le père tel que le représentaient les images pieuses d'antan. » S’il y avait chez lui quelque chose de débonnaire, l’acteur était aussi un pince-sans-rire qui « parle avec une onction non dénuée d'ironie ». Est-ce cette onctuosité, voire cette préciosité du verbe, qui lui valut ses rôles d’ecclésiastique ? À maintes reprises, Michael Lonsdale endossa la soutane (Le Procès d'Orson Welles, 1962), la robe de bure (Le Nom de la rose de Jean-Jacques Annaud, 1986), arbora la pourpre des cardinaux (Galileo de Joseph Losey, 1974) et se fit même archange Gabriel dans Ma vie est un enfer de Josiane Balasko (1991).

Mais comme tout grand acteur, Michael Lonsdale ne se laissa jamais « enrôler » par ses personnages, et ce malgré son timbre de voix si caractéristique. Il fut tour à tour policier, assassin, vice-consul, chapelier, juge, duc ou ponte de la médecine comme dans Hibernatus d’Édouard Molinaro (1969) où le professeur Édouard Loriebat donne la réplique à Louis de Funès et régale ainsi tous les publics. Paradoxalement, ce grand cœur connut la notoriété mondiale dans un rôle de méchant : avec Moonraker (1979), son nom reste associé pour l’éternité à l’austère figure d’Hugo Drax. Roger Moore le fait disparaître dans le vide sidéral avant de s’écrier : « He had to fly ». Oui, Michael Lonsdale « s’est envolé ». Pour de bon, pour toujours mais pas dans le vide.
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Michael Lonsdale, un acteur de bonne foi
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