Ukraine : l’étoile de Zelensky pâlit
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Ukraine : l’étoile de Zelensky pâlit

Par Philippe Oswald - Publié le 08/08/2022
Alors que la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine est entrée dans son sixième mois, l’aura qui entourait en Occident le président ukrainien Volodymyr Zelensky, pâlit. Son étoile est même sérieusement écornée par une série d’informations répercutées par des médias pourtant favorables à la cause ukrainienne. Les attaques pour corruption qui visent personnellement l’ancien comique ont été relancées en France par un livre à charge "Volodymyr Zelensky : dans la tête d'un héros" du journaliste Régis Gente (cf. par exemple, cette émission de BFMTV du 7 août ). Elles fragilisent Zelensky auprès de ses alliés occidentaux, déjà agacés par les nombreuses piques que leur adresse le président ukrainien qui les accuse de mollesse voire de trahison au profit de l’ennemi russe.

Mais si trahison il y a, elle n’épargne pas des responsables ukrainiens de l’entourage du président. Le mois dernier, Zelinsky a opéré une vaste purge parmi ses proches et dans les services secrets (Le Figaro du 19 juillet). Parmi les têtes qui sont tombées, celle d’une femme, Iryna Venediktova, une juriste de 43 ans nommée procureur général d’Ukraine, l’équivalent d’un ministre de la Justice, après avoir soutenu activement la campagne électorale de Zelensky en 2019. Depuis le début de l’invasion russe, elle menait les enquêtes sur les crimes de guerre perpétrés par les envahisseurs. Plus proche encore de Zelensky puisque c’est un ami d’enfance, Ivan Bakanov, 47 ans, a été révoqué de la tête des services secrets (SBU) où il avait été parachuté après avoir été une cheville ouvrière de la campagne présidentielle. Ami ou complice ? Ancien juriste de la société de production de Zelensky, il aurait mis en place un système offshore dévoilé par les « Pandora Papers ». Héritage de la période soviétique, le SBU garde l’empreinte génétique du KGB – dont une administration pléthorique : 30 000 employés. C’est un grand aquarium où nombre de requins naviguent en eaux troubles, entre trahison (agents doubles) et corruption, les deux faisant bon ménage. Soupçonné d’avoir donné aux Russes de précieuses informations, l’adjoint de Bakanov, le général Ihor Sadokhin, a été arrêté. Et ce n’est là que le dessus du panier : 651 responsables locaux sont sur la sellette, dont une soixantaine d’employés du SBU et du bureau de la procureur générale restés dans les zones occupées par les forces russes et prorusses, aux dires de Zelensky lui-même.

Une autre information est venue renforcer les soupçons de corruption au sein des instances ukrainiennes. Elle émane d’une enquête de la grande chaîne américaine CBS News selon laquelle quelque 30% des armes (légères et non létales – jumelles par exemple) massivement fournies par ses soutiens occidentaux à l’armée ukrainienne seraient détournés et ne parviendraient jamais à destination. Curieusement, le lien avec cette émission choc "Arming Ukraine", a été désactivé ce 8 août, au lendemain de sa diffusion...

Mais l’information qui a fait littéralement sortir de ses gonds le président ukrainien émane d’un rapport publié le 4 août par Amnesty International (en lien ci-dessous), organisation qui n’est pas réputée porter dans son cœur la Russie de Vladimir Poutine. Sans dédouaner les soldats russes de crimes de guerre, au contraire en soulignant que les pratiques ukrainiennes ne « justifient en aucun cas les attaques russes aveugles » qui ont frappé les populations civiles, l’ONG accuse l’armée ukrainienne d’utiliser des tactiques qui violent le droit humanitaire international et mettent en danger la population civile en « établissant des bases et en utilisant des systèmes d’armement dans des zones résidentielles habitées, notamment des écoles et des hôpitaux ». Il ne s’agit pas d’erreurs ou de bavures, selon Amnesty International, mais bien de « tactiques de combat [qui] transforment des biens de caractère civil en cibles militaires (…) s’abstenant ainsi de prendre toutes les précautions possibles pour protéger la population », ce qui permet d’accuser ensuite l’armée russe de cibler des civils sans les prévenir des dangers auxquels ils sont exposés. Cette véritable bombe qui a des résonnances dans le monde entier résulte d’une enquête de plus de quatre mois sur le terrain par une équipe d’Amnesty International. Le président ukrainien a aussitôt réagi en dénonçant « un rapport dans lequel la victime et l’agresseur sont d’une certaine manière mis sur un pied d’égalité ». Tout en disant regretter « profondément le désarroi et la colère » provoquée par son rapport, l’ONG ne le désavoue pas : « Nous maintenons pleinement nos conclusions » a-t-elle communiqué. « Le fait de se trouver dans une position de défense ne dispense pas l’armée ukrainienne de respecter le droit international humanitaire », a répliqué à Volodymyr Zelensky Agnès Callamard, la secrétaire générale d’Amnesty International. À chacun de se faire une opinion en lisant ce document ci-dessous.
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Ukraine : l’étoile de Zelensky pâlit
Ukraine : les tactiques de combats ukrainiennes mettent en danger la population civile
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