« Terroriste » ou « déséquilibré », faut-il choisir ?
Société

« Terroriste » ou « déséquilibré », faut-il choisir ?

Par Philippe Oswald - Publié le 07/01/2020
Cela en deviendrait comique si ce n’était dramatique : après chaque nouvelle agression commise, à l’arme blanche de plus en plus souvent, par un musulman « radicalisé », la première annonce des autorités et des principaux médias est que le « suspect » souffre d’un déséquilibre psychologique.

On nous a resservi cette explication quasi réflexe, vendredi dernier, 3 janvier, dans les heures qui ont suivi l’attentat commis à Villejuif par un jeune converti à l’islam. Connu des services de police mais non fiché S, il a tué un homme tentant de protéger sa femme, elle-même grièvement blessée ainsi que deux autres passantes, poignardées au hasard. Au hasard ? En fait, pas tout à fait, car l’assassin venait d’épargner un homme auquel il avait enjoint de réciter une prière musulmane, afin de ne pas confondre un « fidèle » avec un « mécréant ». Ce détail et quelques autres ont conduit, 24h plus tard, le Parquet national antiterroriste (PNAT) à se saisir de l’enquête, après que le procureur de la République de Créteil, Laure Beccuau, avait eu le courage de déclarer qu’un « acte terroriste n’est pas exclu parce qu’une personne a des antécédents psychiatriques ». Dans la bouche d’une telle autorité judiciaire, la remarque est trop rare pour ne pas être soulignée.

Le surlendemain, dimanche 5 janvier, un drame semblable était évité de justesse à Metz-Borny où un individu fiché S brandissant un couteau au cri de « Allah akbar ! » était « neutralisé » par la police avant d’avoir pu frapper. Là encore, « pas de conclusions hâtives » selon la police, cet homme était manifestement fragile psychologiquement. Toujours ce même dimanche, en Allemagne, la police abattait un turc, armé d'un couteau, qui tentait d'attaquer des policiers à Gelsenkirchen (ouest), toujours au cri de « Allah akbar ! ». Nouvelle alerte le soir de ce même dimanche, à Paris cette fois, où une femme intégralement voilée et gantée, dont le comportement inquiétant était signalé à la police par un voyageur, était interpellée, gare d’Austerlitz. Elle fut placée en garde à vue puis mise en observation à l’infirmerie psychiatrique de la préfecture de police. Cette mesure, sans doute justifiée par une attitude égarée et des propos incohérents, doit-elle faire oublier qu’on avait trouvé dans son sac, outre un Coran, un couteau qui n’avait rien d’un canif ?

Il y a longtemps que Daech, alias l’Etat islamique, a donné pour mot d’ordre à ses fidèles présents en Europe de s’attaquer aux « mécréants » par tous les moyens disponibles. En septembre 2014, le porte-parole de l’État islamique lançait ce sinistre appel : « Si vous pouvez tuer un incroyant américain ou européen - en particulier les méchants et sales Français - (…) alors comptez sur Allah et tuez-le de n’importe quelle manière. Si vous ne pouvez pas trouver d’engin explosif ou de munitions, alors isolez l’Américain infidèle, le Français infidèle, ou n’importe lequel de ses alliés. Écrasez-lui la tête à coups de pierres, tuez-le avec un couteau, renversez-le avec votre voiture, jetez-le dans le vide, étouffez-le ou empoisonnez-le. » On connaît la suite : les tueries de masse des 6-7 janvier 2015 à Paris (17 morts à Montrouge, Charlie Hebdo et à l’Hyper Cacher), du 13 novembre 2015 toujours à Paris (130 morts au Stade de France, dans l’Est parisien et au Bataclan), et du 14 juillet 2016, à Nice (86 morts). Les défaites militaires de l’EI en Syrie et en Irak ne l’ont pas empêché d’adresser aux Français le 1er janvier 2020 une piqûre de rappel, en guise de bons vœux, dans une vidéo montrant quel travail efficace peut être opéré avec une « simple lame ». Remarquons que dans toutes ces directives assassines des islamistes, on n’a jamais vu figurer la mention : « simples d’esprit, s’abstenir ! ».

Osons en conclure que la distinction, pour ne pas dire l’opposition, systématiquement opérée par les autorités et les médias qui les relaient, entre « déséquilibré » et « terroriste », nous égare et nous affaiblit dans la lutte contre le terrorisme islamique. A fortiori quand elle est énoncée avant la conclusion de l’enquête, tant la frontière entre un « fou d’Allah » et un fou tout court est difficile à établir. On en a d’ailleurs tellement usé et abusé que son effet anesthésiant sur l’opinion se dissipe d’attentat en attentat. Il en va de même pour l’accusation d’« islamophobie » : elle aussi s’émousse tant il apparaît que les problèmes que nous posent, non pas l’ensemble des musulmans, mais les « fous d’Allah », ne peuvent plus nous dispenser de poser un regard critique sur l’islam. En ce lugubre anniversaire des tueries du 7 janvier 2015, prélude à tant d’autres attentats, il devient impossible de censurer certaines questions sur cette religion. À commencer par celle-ci : pourquoi l’islam est-il systématiquement invoqué par la quasi-totalité des terroristes ou/et des déséquilibrés qui sévissent sur notre sol ?
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« Terroriste » ou « déséquilibré », faut-il choisir ?
Attaques au couteau : où se situe la frontière entre islamiste et déséquilibré ?
Le Figaro
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