Pourquoi Trump suspend la subvention américaine à l’OMS
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Pourquoi Trump suspend la subvention américaine à l’OMS

Par Philippe Oswald - Publié le 16/04/2020
« Aujourd’hui, j’ordonne la suspension du financement de l’Organisation Mondiale de la Santé pendant qu’une étude est menée pour examiner son rôle dans la mauvaise gestion et la dissimulation de la propagation du coronavirus » a annoncé Donald Trump le 14 avril. Avec une contribution annuelle de 400 à 500 millions de dollars - soit « dix fois le montant chinois » au budget de l’OMS selon le chef de la diplomatie américaine, Mike Pompeo -, les Etats-Unis étaient les premiers bailleurs de l’agence onusienne (à hauteur de 22% - la France contribue à 4,9%).

À son habitude, Trump n’a pas tourné autour du pot pour expliquer la sanction : il accuse l’OMS d’avoir complaisamment relayé les informations rassurantes distillées par la Chine. Jusqu’à la fin janvier, Pékin assurait que la propagation du virus était contenue et que l’épidémie ne risquait pas de tourner à la pandémie. Le directeur général de l’OMS, l’Ethiopien Tedros Adhanom Ghebreyesus, ne tarissait pas d’éloge sur la République Populaire de Chine, ne ratant pas une occasion de vanter la « transparence » des autorités et leur « disposition à partager les informations », sous le « très exceptionnel leadership » du président Xi Jinping. Le 3 février, il s’était même risqué à critiquer la décision américaine de fermer les frontières aux ressortissants étrangers venant de Chine.

À vrai dire, Trump lui-même avait d’abord félicité la Chine pour l’efficacité de son combat contre le Covid-19 et sa « transparence » à ce sujet. Jusqu’au mois dernier, le président américain préférait parier sur une épidémie contenue, peu menaçante pour les 300 millions d’Américains … et pour sa réélection. Depuis, le nombre de ses compatriotes contaminés (644.348 ce 16 avril) et décédés (28.554) lui ont fait changer son fusil d’épaule. « Si l’OMS avait fait son travail et envoyé des experts médicaux en Chine pour étudier objectivement la situation sur le terrain, l’épidémie aurait pu être contenue à sa source avec très peu de morts », a-t-il martelé. Pour étayer ses accusations contre l’OMS, Trump a annoncé l’ouverture d’une enquête « très approfondie ». À terme, il faudra « changer radicalement le fonctionnement de l'organisation » a précisé Mike Pompeo.

Au-delà de l’OMS, c’est donc un nouvel épisode de la confrontation entre les Etats-Unis et la Chine qui s’ouvre. Il sera nourri, du côté des médias américains et occidentaux, par une reprise des interrogations sur la chronologie des événements depuis le début de l’épidémie, sur l'origine du virus, sur l’affirmation hasardeuse - reprise par l’OMS le 16 janvier - de l’absence de preuves d’une transmission du coronavirus entre humains, sur le nombre de Chinois infectés et décédés, sur le sort des lanceurs d’alerte chinois ou sur des événements intrigants telle la fermeture, le 12 janvier, du premier laboratoire chinois ayant séquencé le génome du Covid-19, le Centre clinique de santé publique de Shanghai.

Mais l’OMS, dans tout ça ? Serait-elle une innocente victime collatérale de l’affrontement entre les deux super-puissances ? Il n’y a pas que Donald Trump pour juger catastrophique la gestion de la pandémie par l’agence onusienne. Au Royaume Uni, la Commission des affaires étrangères de la Chambre des communes a publié le 6 avril une analyse critique de la réaction des organisations internationales, dont l’OMS, face à la crise sanitaire. On y lit notamment ceci : « Pays dans lequel le virus a trouvé son origine, la Chine aurait dû jouer un rôle central dans la collecte et la diffusion d’informations pertinentes qui auraient permis à la communauté scientifique de mettre au point une riposte rapide et efficace. Or, (…) la Chine a dès le début maquillé les faits. Le docteur Li Wenliang [mort du Covid-19 et réhabilité sous la pression populaire NDLR] a lancé l’alerte sur le virus le 30 décembre 2020 : il a été arrêté, contraint de se rétracter, et a dû confesser avoir diffusé de fausses informations ». Quant à l’OMS, elle n’a envoyé une mission à Wuhan que le 21 janvier. Il aura fallu attendre le retour de Pékin de son directeur général en personne, pour que l’OMS se décide enfin à proclamer l’état d’urgence sanitaire, le 30 janvier. Il avait pourtant été informé de ce qui se passait à Wuhan dès la fin du mois de décembre par les autorités de Taïwan… Manifestement, il avait préféré prêter l’oreille à celles de Pékin. Rien de très surprenant : premier Africain à la tête de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus est un ancien membre du Parti communiste d’un pays particulièrement prisé par Pékin. Depuis une décennie, la Chine pousse ses pions dans les organisations internationales telles la FAO, l’OMS, Interpol, ou encore le FMI et la Banque Mondiale, en se servant de ses alliés ou de ses obligés pour promouvoir ses candidats.
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