Pékin resserre son étreinte sur Hongkong
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Pékin resserre son étreinte sur Hongkong

Par Philippe Oswald - Publié le 23/04/2020
Tandis que la crise du coronavirus focalise l’attention du monde entier, Pékin renforce la répression dans la région administrative spéciale de Hongkong. Quatorze figures du camp prodémocratie, douze hommes et deux femmes, ont été interpellées le 18 avril sous l’inculpation de « rassemblements non-autorisés » pour avoir participé l’an dernier aux manifestations contre les autorités de la Chine communiste. Elles ont été relâchées sous caution en attendant de passer en jugement le 19 mai. Parmi ces personnes, la parlementaire prodémocratie Claudia Mo, le patron de presse, Jimmy Lai, 72 ans, un catholique fondateur du seul quotidien d’opposition Apple Daily (déjà arrêté en février dernier), l’avocate des droits l’homme et ancienne députée Margaret Ng Ngoi-yee,72 ans, et l’avocat catholique Martin Lee, 81 ans, fondateur du Parti démocratique de Hongkong, dont l’interpellation a particulièrement choqué l’opinion publique. Cet octogénaire, parfaitement pacifique, est en effet considéré comme le père fondateur du mouvement démocratique hongkongais depuis la rétrocession de l’ancienne colonie britannique à la Chine en 1997. Depuis le début du mouvement prodémocratie à Hongkong, en juin 2019, près de 7000 personnes, dont une majorité d’étudiants, ont subi des arrestations pour avoir manifesté contre Pékin.

Pour l’organisation Hongkong Watch, basée au Royaume Uni, « le Parti communiste chinois profite de la pandémie de Covid-19 pour étouffer toute dissidence ». Il fallait s’y attendre depuis la nomination, de Xia Baolong, un proche de Xi Jinping, à la tête du bureau des affaires de Hongkong et Macao, en février, alors que la crise sanitaire Covid-19 avait interrompu les manifestations. Ces interpellations font partie de mesures préventives organisées par le régime chinois dans la perspective des élections législatives de septembre prochain à Hongkong où le camp pro-Pékin pourrait perdre la majorité. Redoutant un effet dominos, le pouvoir communiste met tout en œuvre pour s’opposer à l’instauration d’un véritable suffrage universel pour les 7,4 millions d’habitants de la ville-État.

Mais il y a plus grave que ces interpellations : Pékin vient de déclencher une crise constitutionnelle majeure à Hongkong dont l’enjeu est l’autonomie du gouvernement local. Sur le papier, la Basic Law, la loi fondamentale hongkongaise qui fait office de Constitution, ne permet pas aux autorités continentales d’interférer dans les affaires intérieures de la région administrative spéciale. Mais le « bureau de liaison » de Pékin à Hong-Kong prétend qu’il lui appartient de « superviser » la façon dont le principe « un pays, deux systèmes » doit s’appliquer. Son chef, Luo Huining, a appelé le 15 avril le gouvernement local à promulguer « le plus vite possible » l’article 23 contre « les actes terroristes et discours de haine ». Or la promulgation de cet article donnerait au gouvernement une arme légale pour museler toute opposition au nom de la « sécurité nationale ». C’est déjà contre le spectre de cet article 23 que les Hongkongais s’étaient mobilisés en masse par le passé, notamment en 2003. Après avoir paru tergiverser, le gouvernement local a admis la légitimité de ce « bureau de liaison » à se prononcer sur les affaires internes de Hongkong, ce qui contrevient à l’accord de rétrocession signé entre la Chine et le Royaume Uni en 1997. « Pékin et le gouvernement soumis de Hongkong ont fait encore un pas vers l’enterrement du principe “un pays deux systèmes” » a commenté le 18 avril, Chris Patten, le dernier gouverneur britannique de Hongkong. Le remaniement ministériel annoncé hier, 22 avril, par Carrie Lam, la « femme de paille » de Pékin à la tête de l’exécutif hongkongais, confirme la détermination de Pékin à gérer de plus en plus près les affaires de Hongkong : cinq ministres ont perdu leur portefeuille, dont celui des Affaires constitutionnelles.
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