Mbappé/Messi : ce n'est pas encore le crépuscule des vieux
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Mbappé/Messi : ce n'est pas encore le crépuscule des vieux

Par Louis Daufresne - Publié le 18/02/2021
Mardi soir, le PSG livrait à Barcelone un match d’anthologie. Jamais aucun joueur, dans l’antre du Camp Nou, n'avait marqué trois fois face à MessiKylian Mbappé l’a fait, pour propulser son équipe aux portes des quarts de finale de la Ligue des champions. 

Talent révélé à 17 ans sur la scène européenne avec Monaco, champion du monde à 19 ans, Mbappé, à 22 ans, « détruit le Barça », titre Marca, le journal le plus vendu d'Espagne. En l'absence de Neymar, blessé, « le messie, c'est Mbappé », s’écrie Le Parisien. Comme beaucoup de médias en Europe, le journal parle d’« un air de passation de pouvoirs » entre l'Argentin et le Français de 22 ans. Derrière Lionel Messi et Cristiano Ronaldo, onze Ballons d'or à eux deux, « Kyky » s’impose comme candidat à leur succession.

Ce que peu d’observateurs soulignent, c’est l’allongement de la durée de la vie, y compris chez les footballeurs. Que Messi (qui enfant était handicapé et qui a 33 ans) puisse encore rivaliser avec Mbappé, voilà l’exploit ! Que Zlatan Ibrahimovic (39 ans) s’amuse encore à Milan et que Ronaldo (36 ans) brille toujours avec la Juve témoigne de la révolution silencieuse accomplie par l’ingénierie sportive. « Une équipe entièrement composée de joueurs de 35 ans et plus aurait (…) son mot à dire en Italie », relève Le Soir, malgré un championnat aussi exigeant que tactique.

Cette évolution marque également le monde du tennis. On ne trouvait que six trentenaires dans le top 100 ATP en 1986. Ils étaient 40 en 2017, pour une moyenne d’âge passée de 24 ans en 1985 à 28 ans en 2017. Après trois ans d’absence, Roger Federer atteignait les demi-finales en 2019 à l'âge de 37 ans. Les jeunes pousses ont toujours le plus grand mal à éliminer Nadal (34 ans) et Djokovic (33 ans) sera encore dimanche en finale à Melbourne.

Cette longévité s’explique de plusieurs manières :

- l’hygiène de vie dominée par une alimentation hyper dosée ;

- la cryothérapie. Les bains froids font des miracles sur la récupération après effort intense ;

- les opérations chirurgicales ;

- la prévention des blessures ;

- la présence d'un encadrement médical de plus en plus étoffé.

Le sport hérite des progrès de la médecine traumatique. Qui se souvient de la silhouette de l'ancien Stéphanois Patrick Revelli voit bien que les RoboCop d'aujourd'hui n'ont plus rien à voir. Sans même parler de la préparation mentale.

Cette évolution permet de mettre fin aux carrières courtes, aux placements à terme. Plus la performance dure, plus la mise de fonds se justifie, plus l'investissement est rentable. Plus la communication sur le joueur est amortie. Gageons qu’un Messi ou un Ronaldo, même à 70 ans, feraient encore des entrées payantes s’ils devaient reposer le pied sur une pelouse. Hormis le pape, Donald Trump, Bill Gates ou Kim Kardashian, seuls quelques footballeurs accèdent au club hyper fermé des icônes planétaires. La FIFA (Fédération internationale de football association) est du reste la seule institution capable de faire appliquer ses lois dans tous les pays et en même temps, ce qui fascine Jacques Attali.

Lénine faisait de l’impérialisme le stade suprême du capitalisme. N’est-ce pas plutôt le sport – qui jouit d’une forme de culte impérial associé à l'argent ? Même la cathédrale Notre-Dame de Paris doit être pimpante pour faire honneur aux athlètes de 2024. Depuis les Dieux du stade, le célèbre film de propagande de Leni Riefenstahl sur les Jeux olympiques de 1936, l'image sublime le corps à outrance. Beauté et performance ne font plus qu’un. Le sport de haut niveau est à la fois un laboratoire et un modèle, comme le démontre le philosophe Robert Redeker dans l'emprise sportive. Les usines à champion du « capitalisme techno-marchand » constituent un visage peu connu de l'esclavage moderne, une sorte d'envers du sport, comme l’illustre ce documentaire d’Arte sur la gymnastique roumaine Deva, l'école des petites médaillées. Pour un espoir de succès, combien de déchets !

À bientôt 40 ans, Ronaldo - seul au monde à avoir dépassé tout récemment les 500 millions de followers sur les réseaux sociaux - incarne cette toute-puissance esthétique de l’homme-machine, invincible et parfait. L’idole ne descend plus sur Terre ; elle écume les airs. Sinon, comment expliquer que le Portugais le plus célèbre de tous les temps puisse encore s'élever à 2,56 m du sol et… marquer ?
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