L'extrême gauche se sent pousser les ailes du délire
Politique

L'extrême gauche se sent pousser les ailes du délire

Par Louis Daufresne - Publié le 22/01/2021
Au CAC 40 des idées, si la plupart des valeurs sont en berne, vitrifiées par le Covid, certaines se portent bien et moissonnent les dividendes idéologiques. C’est le cas de l’extrême gauche, dopée par la victoire des démocrates américains. Cette mouvance connaît chez nous un bond spéculatif, à travers des faits apparemment anodins. Prenons-en trois qui n’ont rien à voir entre eux : l’interview dans L’Obs de la chanteuse Camélia Jordana, le conflit entre Jean-Pierre Obin et la FCPE et le départ du Monde du dessinateur Xavier Gorce. Aucun de ces événements n’a de lien avec la situation US, évidemment. Sauf que le baromètre idéologique se règle aux États-Unis où un nouveau climat s’installe – qui clôt la parenthèse d’une certaine pornographie populiste incarnée par Donald Trump. Le diable étant remis dans sa boîte, médiatiquement cadenassée, ses adversaires les plus résolus ne visent pas un retour à la frugalité du débat. Bien au contraire, ils plastronnent comme les Allemands de l’Ouest après la chute du Mur, désireux d’avaler un territoire humilié. Joe Biden donne quitus aux plus excités quand il « voit surgir l’extrémisme politique, le suprémacisme blanc et le terrorisme intérieur »Le Capitole n’est pas la Bastille ; seule l’extrême gauche a le droit de subvertir les institutions et même quand elle les occupe, elle continue de pourchasser l’ennemi. Son hégémonie suppose la chasse à l’homme. Qui peut croire que les paroles de Joe Biden ne sortiront pas des États-Unis ? L’affaire Traoré et le déboulonnage de Colbert les prophétisaient. Aujourd’hui, cet activisme-là va de plus en plus au contact, et pas seulement avec la police sur la loi de sécurité globale :

Cinq jours avant le discours du 46e président US, la chanteuse Camélia Jordana déclare à L’Obs : « Si j’étais un homme, je demanderais pardon. » C’est « une idée venue tout droit des États-Unis, analyse Pascal Bruckner dans Le Figaro. L’homme blanc (…) coupable de tous les malheurs du monde rencontre chez nous un succès inattendu chez les comédiens et chanteurs (eux-mêmes plébiscités pourtant par des hommes ou des femmes blanches). » L’essayiste s’aperçoit bien que « ces fariboles interviennent dans un contexte de vide de la gauche classique. Le marxisme est mort en I989, la social-démocratie n’est pas en grande forme. Pour combler ce sentiment de désarroi, il est tentant d’adopter les théories américaines du genre, de la race et de l’identité qui ramènent toute l’histoire humaine à ces trois dimensions. » Et Bruckner d’ajouter qu’ « une vaste entreprise de rééducation est en marche, à l’université, dans les media, qui demande à ceux qu’on appelle les Blancs de se renier ». Qui se préoccupe de ce projet, à Sciences-Po ou ailleurs ? 

Jour de l’investiture de Joe Biden, 20 janvier, au tribunal de Paris : la FCPE, première fédération de parents d’élèves, attaque en diffamation Jean-Pierre Obin, l’auteur de Comment on a laissé l’islamisme pénétrer l’école (Hermann, 2020). Soutenu par l’ancien Premier ministre Manuel Valls, l’ex-inspecteur de l’Éducation nationale accuse Rodrigo Arenas d’avoir donné des gages aux islamistes lorsqu’il dirigeait la FCPE 93. L’homme s’en serait pris à un proviseur rappelant à ses élèves que le voile est interdit à l’école… Obin vise aussi la Ligue des droits de l’homme et le syndicat étudiant Unef, tous deux « entrés dans l’orbite islamogauchiste à la faveur de la prise de pouvoir de militants d’extrême gauche ». Cet épisode n'est qu'un parmi d'autres. Récemment, Edwy Plenel livrait en pâture le nom d'une femme professeur de droit à Aix-Marseille après qu’elle eut qualifié l'islam de « religion sexuellement transmissible ». Là aussi, qui se soucie d'elle qui, comme Mila, vit dans le terrier de la peur ?

20 janvier également : le dessinateur de presse Xavier Gorce, créateur des « Indégivrables », démissionne du journal Le Monde où il officie depuis presque 20 ans« Décision personnelle, unilatérale et définitive. La liberté ne se négocie pas », fait-il savoir sur Twitter. Ses pingouins doués de parole se noient dans les eaux glacées de la censure. Le casus belli vient d’un jeune oiseau interrogeant son congénère : « Si j'ai été abusé par le demi-frère adoptif de la compagne de mon père transgenre devenu ma mère, est-ce un inceste ? » Des internautes plaident la transphobie et le mépris pour les victimes. Ils font si bien chorus que le journal de référence se couche et s’excuse, comme le mâle blanc appelé à s'agenouiller pour demander pardon. Dans Le Point, Xavier Gorce dresse un parallèle avec la décision du New York Times de renoncer à publier des caricatures dans son édition internationale. « J'espère que la culture woke présente dans la presse anglo-saxonne dite de gauche n'est pas en train de déteindre sur la presse française... », s’écrie-t-il dans cet entretien daté du 20 janvier. Le slogan « Je suis Charlie » semble pris dans la glace. HibernatUS.
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Pascal Bruckner : « La seule identité encore autorisée pour les blancs est l’identité de contrition »
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