Les petits Français sont nuls en maths
Éducation

Les petits Français sont nuls en maths

Par Louis Daufresne - Publié le 09/12/2020
Zéro pointé ! En maths, les petits Français font toujours partie des derniers de la classe, comme le montre la dernière étude TIMSS publiée hier par l'Association internationale pour l'évaluation de la réussite éducative (IAE), un organisme scientifique basé aux États-Unis. TIMSS (Trends in Mathematics and Science Study) mesure tous les quatre ans le niveau des connaissances scolaires des élèves de CM1 et de 4e en mathématiques et en sciences. Chez nous, 4000 enfants par niveau ont été évalués en mai 2019.

Qu’en ressort-il ? Qu’en 4 ans, la situation s’est encore dégradée :

1. En mathématiques, en CM1, la France ferme la marche de l'Union européenne. Seul le Chili fait moins bien, si on élargit l’étude au niveau international.

2. « On constate une surreprésentation des élèves les plus faibles. En mathématiques, 15 % des élèves français n'atteignent pas le "niveau bas", contre 6 % des élèves au niveau européen. Cela signifie que ces 15 % n'ont pas les connaissances élémentaires en CM1 », commente Fabienne Rosenwald, directrice de la Depp, l'agence des statistiques du ministère de l’Éducation nationale, interrogée par l’AFP.

3. Un chiffre fait frémir : en France, le résultat moyen est « en baisse de 47 points, c'est l'équivalent d'une année de classe », renchérit Fabienne Rosenwald. « Autrement dit, le niveau des élèves de 4e en 2019 en maths est celui des élèves de 5e en 1995 dans cette matière », regrette-t-elle.

4. Ici encore leçon rime avec sanction : « Seuls 2 % des élèves français atteignent le niveau avancé en 2019 en mathématiques, contre 11 % dans l'Union européenne et 50 % à Singapour », conclut Fabienne Rosenwald.

Devant de si piètres performances, Jean-Michel Blanquer brandit son « plan mathématiques » lancé il y a deux ans, à la suite du rapport écrit par les mathématiciens Cédric Villani et Charles Torossian. Pour le ministre de l’Éducation nationale, « c'est sur plusieurs années que nous en verrons les effets ». Selon lui, « nos élèves de début de primaire commencent à ne bénéficier ». Rendez-vous est pris en 2023.

On verra si la prochaine étude TIMSS fait grimper la France dans son classement. Prenons le risque de le dire : il y a très peu de chance que ce soit le cas. C’est une question d’état d’esprit. L’arrogance de nos sachants compromet toute vraie remise en cause. Que ce soit le classement de Shanghai (PISA) ou de Boston (TIMSS & PIRLS), nos hauts fonctionnaires n’aiment pas voir leurs politiques évaluées, à plus forte raison par des organismes étrangers. On peut discuter des critères anglo-saxons ou asiatiques mais quand ils abondent dans le même sens, ce n’est pas d’un « plan mathématiques » dont on a besoin mais d’un plan stratégique à l’échelle de toute l’école.

Il y a un paradoxe à voir le niveau en maths baisser, alors que notre système en fait depuis longtemps la seule matière qui compte. Avant, c’est le latin qui jouait ce rôle et l’élitisme faisait une part aux « forts en thème ». Aujourd’hui, un élève peut être nul partout ou presque ; s’il a 18 de moyenne en maths au lycée, il sera courtisé de toutes parts.

Laurent Lafforgue est mathématicien, professeur à l’Institut des hautes études scientifiques (IHES), lauréat 2002 de la médaille Fieds. Joint par LSDJ, il explique la situation :

1. Les mathématiques et le français vont de pair : « Si on dit soit ABC un triangle, souligne-t-il, il faut maîtriser le subjonctif ! » Beaucoup d’élèves pâtissent d’un mauvais enseignement du français. Comble de la situation : « Les professeurs des écoles sont plus souvent issus de formations littéraires », note Sébastien Planchenault, président de l'Apmep, l'association des professeurs de maths.

2. Pour Laurent Lafforgue, « il faudrait enseigner les 4 opérations dès le cours préparatoire et en même temps, car elles sont reliées dans leur principe. Des instits m’ont avoué qu’ils ne savaient pas poser une division ». Laurent Lafforgue plaide pour un enseignement en spirale. On fait les choses tôt et on les répète au fil des ans en les compliquant.

3. Pour notre médaille Fields, « il faut sortir de 50 ans de démolition de l’excellence républicaine ». Alors pourquoi les pays asiatiques sont-ils sur le podium ? Même si la Chine ne figure pas dans l’étude, ses performances seraient comparables à celles de la Corée du Sud, de Singapour, de Taïwan ou du Japon. Quant à la Russie, son école de mathématiques est l’une des meilleures du monde.

Il y a une raison simple : là-bas, on mise tout sur la connaissance. Le savoir n’est pas décapité, le professeur non plus. Topaze aux yeux bridés est reconnu et respecté. La discipline règne. Ça bosse, parfois jusqu'à l'excès, comme le montre ce reportage d'Arte. Et leur bosse des maths gonfle, gonfle…
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