Les Gilets Jaunes, jacquerie 2.0
Société

Les Gilets Jaunes, jacquerie 2.0

Par Judikael Hirel - Publié le 02/12/2018
Pourquoi le mouvement des Gilets Jaunes fait-il aussi peur aux politiques, aux syndicats, et à la presse ? Parce qu’ils ne le comprennent pas, ne le contrôlent pas, et ne l’ont pas vu venir. Retour sur la naissance d’un mouvement aujourd’hui au bord de l’insurrection.

Au-delà des violences extrêmes commises par des casseurs professionnels, accompagnés de pillards opportunistes, le mouvement des Gilets Jaunes cristallise la colère de la France qui, bien que travaillant, parvient de moins en moins à boucler ses fins de mois. Travailler plus pour gagner moins… Venue après la hausse du gaz et de l’électricité, le coup de rabot sur les retraites, mais aussi l’explosion des amendes de stationnement et de radars, la hausse des taxes sur le gazole a fini d’exaspérer "la France qui fume des clopes, qui roule au diesel", selon l'expression de Benjamin Griveaux. Une France bien consciente d’un système à deux vitesses où les riches sont toujours plus riches, pour qui l’ISF a été supprimée, et où l’argent censé aller à la transition écologique finira à boucler les fins de mois d’un Etat qui dépense trop.

Mais face à cette mobilisation sans leader réel, dont les membres sont fiers de se passer des syndicats et de ne pas se faire récupérer par un parti, médias et politiques n’ont guère de prise. Car ce mouvement venu de la base, centré sur les dépenses des ménages, s’est pour la première fois développé via les réseaux sociaux. Tel le jumeau politique en creux du parti qui, le temps d’une campagne éclair, a porté Emmanuel Macron au pouvoir. Car cette jacquerie 2.0, si elle a été entretenue par quelques phrases malvenues du Président (des gaulois réfractaires à la rue à traverser pour trouver un job) est avant tout née de quelques pétitions sur les réseaux sociaux. De Facebook à YouTube, de partages entre amis en mailing lists, avant de rejoindre tardivement les colonnes des médias, ce sont d’abord des pétitions qui, comme lors de la loi Travail, cristallisent le ras-le-bol. Celle lancée par Priscillia Ludosky, une habitante de Seine-et-Marne s’élevait dès le mois de mai contre la hausse du prix du carburant. Elle a dépassé aujourd’hui le million de signatures sur la a plateforme Change.org.


Mais ce n’est que début octobre que deux chauffeurs routiers, eux aussi de Seine-et-Marne, Éric Drouet et Bruno Lefevre, reprennent sa pétition, après avoir lu un article à son sujet, paru le 12 octobre dans La République de Seine-et-Marne. Ils lancent via leur groupe Facebook un appel au "blocage national contre la hausse du carburant" pour le 17 novembre. L’information est relayée par Le Parisien le 21 octobre. La réaction en chaîne était enclenchée, et le sujet est repris dans les colonnes tous les médias. Vanessa Relouzat, la journaliste à l’origine du premier article, n’en imaginait sans doute pas les conséquences…

Peu après, la vidéo sur YouTube de la Bretonne Jacline Mouraud, diffusée en ligne le 18 octobre, devient virale. Déjà vu par plus de six millions de personnes, son coup de gueule va créer une floraison de vocations de Youtubeurs improvisés, de Françaises et Français "d’en bas" exprimant leur colère. Les premiers Gilets jaunes feront leur apparition sur le terrain le 9 novembre, lors d’une visite du Président Macron dans la Somme. En moins d’un mois, les Gilets Jaunes, un mouvement parti de la colère exprimée en ligne par quelques citoyens, a déjà poussé les institutions dans leurs retranchements. Mais ce n’est sans doute que le premier d’un nouveau genre. Quel sera le prochain ? Attendons déjà de voir comment celui-ci s’achèvera…
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