Les familles nombreuses polluent-elles la planète ?
Société

Les familles nombreuses polluent-elles la planète ?

Par Judikael Hirel - Publié le 13/07/2022
Désormais, il parait qu'avoir des enfants nuit à l'environnement. Les familles nombreuses s'étaient, à la longue, habituées aux critiques et aux regards parfois acerbes de celles et ceux qui n’ont pas fait ce choix. Mais voilà qu'on leur reproche maintenant leur inconscience, leur égoïsme : elles ne pensent pas aux générations futures. Elles accélèrent le suicide de notre planète, elles exposent un être innocent à un avenir atroce sur une planète inéluctablement brûlante. Peut-être est-ce pour cela que l’on voit, dans les grandes métropoles, de plus en plus de jeunes couples préférant avoir un chien plutôt qu’un enfant. À tel point qu'apparaissent même des poussettes à chien, des psychologues pour chien… Quand l’Espérance n’est pas au rendez-vous, la peur de la fin du monde devient environnementale. Ainsi, avoir des enfants contribuerait à polluer la planète : un enfant génère 58,3 tonnes de dioxyde de carbone par an, selon une étude menée par des chercheurs de l’université suédoise de Lund. Oui, on mesure le degré de pollution d’un enfant comme on pourrait le faire d’une voiture ou d’un smartphone… Quelle étrange vision de l’être humain, notamment à naître !

Faut-il limiter les naissances pour sauver la planète ? C’est ce que défendait récemment l’essayiste et prospectiviste Antoine Bueno dans un débat avec le philosophe et père d’une famille nombreuse Fabrice Hadjadj, dans les colonnes du Figaro Magazine. Pour Antoine Bueno, reprenant une vieille antienne de l’écologie extrême, c’est le cas. Il va jusqu’à parler de "comportement écocidaire" Fonder une famille nombreuse doit selon lui être considéré comme un comportement d’indifférence ou d’inconscience écologique. On retrouve là un discours prôné depuis des décennies par certains militants écologistes extrêmes, tels Yves Cochet. Le contrôle total des naissances à la chinoise n'est jamais loin derrière un tel discours. Pourtant, l’impact écologique de l’humanité dépend en fait à la fois du nombre d’habitants et de leur mode de vie. Et, comme le rappelait le philosophe dans cet échange, "la vie peut-elle se ramener à des problèmes techniques ? Est-ce une atteinte contre l’environnement de fonder une famille nombreuse ?"

Après les Dinks ("Double income, no kids", "deux revenus, pas d’enfants") si appréciés des banquiers, place désormais aux Ginks, pour "Green inclinations, no kids " (souci écologique, pas d’enfants). On connaissait déjà la honte de prendre l'avion, voici donc celle d'engendrer. Pour sauver la planète, dans un monde entre guerre, violence et réchauffement climatique, certains jeunes gens ne veulent tout simplement pas avoir d’enfants. Ils contribuent au passage au vieillissement de la population dans leur pays, et amplifient les conséquences du grand défi migratoire auquel est désormais confronté la "vieille" Europe face à la jeune Afrique.

Le meilleur moyen pour réduire son empreinte carbone est-il vraiment d’avoir moins d'enfants ou de ne pas en avoir du tout ? Posée ainsi, la question peut sembler absurde. Cette réification de l’enfant à naître est en soi aussi inhumaine que désespérée. Pourtant, cette petite musique de la dénatalité se diffuse peu à peu. Jusqu’à l’AFP qui, dans une infographie diffusée il y a quelques mois de cela, citait une étude de l'"Environnemental Research Letters" soulignant le fait d' "avoir un enfant en moins" comme la mesure la plus efficace pour réduire son empreinte carbone. En 1798, Thomas Malthus publiait son Essai sur le principe de la population. Il y expliquait que la population allait augmenter plus vite que les ressources disponibles. Au fond, rien de nouveau sous le (chaud) soleil… Ce malthusianisme revu à la sauce environnementaliste d’un nouveau siècle en revient aux mêmes solutions que celles proposées alors par le prêtre anglican : limiter les naissances en arrêtant d'aider les plus pauvres, afin de ne pas encourager leur reproduction. Demain, avec une population mondiale estimée à 9 milliards de personnes en 2050, puis 11 milliards en 2100, en viendra-t-on à imposer un contrôle démographique à l’échelle mondiale, un planning familial planétaire au nom de La Défense de l’environnement ? Qui sait ?
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