L’arrivée des vaccins anti-Covid-19 n’emballe pas franchement les Français
Santé

L’arrivée des vaccins anti-Covid-19 n’emballe pas franchement les Français

Par Philippe Oswald - Publié le 05/12/2020
Quel contraste entre l’enthousiasme officiel à l’annonce de la prochaine mise sur le marché de vaccins anti-Covid-19, et l’opinion publique française ! Loin de partager l’emballement gouvernemental et médiatique envers les prouesses vantées par les laboratoires, celle-ci cultive comme jamais la devise d’Epicharme : « Souviens-toi de te méfier ! ». Dans un sondage Elabe pour BFMTV du 25 novembre, seul un Français sur deux (53%) répondait vouloir certainement ou probablement se faire vacciner contre la Covid-19. Or, ils étaient 64% à afficher cette intention au mois de juillet, souligne Santé publique France dans son communiqué sanitaire hebdomadaire (4 décembre). Plus la probabilité d’une vaccination anti-Covid-19 se renforce, plus l’opinion se montre réticente voire rétive. La première cause de cette défiance est le doute sur l’innocuité de ces nouveaux vaccins produits à une vitesse éclair, dans un climat de concurrence acharnée (9 vaccins sont en lice dont les premiers, disponibles dès janvier, seraient les vaccins de Pfizer/BioNtech et Moderna).

La conférence de presse donnée par le gouvernement jeudi soir, 3 décembre, pour livrer les premiers détails sur la campagne de vaccination aura-t-elle rasséréné les Français ? « Avant même de nous immuniser contre le coronavirus, nous devons d’abord nous immuniser contre les peurs », a affirmé le ministre de la Santé, Olivier Véran. Avant de promettre : « Je m’engage tout au long de la campagne vaccinale à ce que nous fassions preuve de la transparence la plus totale sur l’efficacité du vaccin, l’acceptabilité de la population, l’évolution des recommandations scientifiques et médicales, l’organisation pratique de la campagne, les éventuels effets indésirables, qu’ils soient graves ou bénins ». Mais la ministre de l’Industrie Agnès Pannier-Runacher n’aura pas consolidé cette « acceptabilité » en assurant que la responsabilité d’éventuels effets nocifs de ces vaccins incomberait aux laboratoires pharmaceutiques… Toutefois, il revenait au Premier ministre Jean Castex d’enfoncer le clou de cette conférence de presse en répondant à cette question de LCI (voir vidéo à 1h24'30) : allait-il donner l’exemple, ainsi que les membres du gouvernement, en se faisant vacciner parmi les premiers ? On a alors assisté à un grand moment de télévision (visible ici sur Cnews avec le texte d'un commentaire épicé de Pascal Praud - le même en vidéo) :

« Question piège …mais question intéressante… » a répondu Jean Castex, visiblement embarrassé (voir vidéo à partir de 1h30'10). « C’est-à-dire que, euh, d’abord, là, vous me croirez sur parole, mais je ne figure pas dans les publics prioritaires déterminés par la HAS (Haute Autorité de Santé)… Donc vous voyez bien, le premier inconvénient, si je suivais votre recommandation, d’aucuns, euh, pourraient considérer que c’est un passe-droit…et ce n’est pas dans les habitudes de la maison (sic). Mais je ne pense pas que ce soit ce que vous me suggériez… »(NDLR : Les Français ne se bousculant pour être les premiers à être vaccinés, on ne les voit pas en effet reprocher au Premier ministre de leur damner le pion…) « C’est plutôt sur le terrain de l’exemplarité, au sens, euh, effet d’entraînement… », a poursuivi Jean Castex. « C’est vrai, euh, je vous avoue que je ne me suis pas posé la question en ces termes…euh, c’est vrai, je pense qu’il faut quand même suivre notre stratégie vaccinale et que les premiers responsables du pays doivent s’y conformer, ce que je fais en toute circonstance. » On ne sent pas véritablement l’assurance qu’on attendrait d’un « premier de cordée ».

Un autre grand moment médiatique avait précédé celui-ci. C’était le 26 novembre, sur RMC/BFMTV (en lien ci-dessous). Jean-Jacques Bourdin recevait le Pr. Arnaud Fontanet, épidémiologiste et membre du Conseil scientifique. Une émission éclairante, dans laquelle Arnaud Fontanet a répondu avec une sincérité désarmante aux questions directes de Bourdin. Résumons ce qu’on peut entendre ci-dessous à propos des vaccins anti-Covid (notre sélection à partir de 4’25) :

1°) Les résultats annoncés par les laboratoires ne sont que des « communiqués de presse ». Il faut qu’ils soient confirmés par des publications scientifiques.

2°) Protègeront-ils contre l’infection ou contre des risques de faire des formes graves de la maladie ? « Ce n’est pas la même chose » : dans un cas, vous bloquez la circulation du virus, dans l’autre non.

3°) On ne sait pas combien de temps va durer l’immunité vaccinale.

4°) « Il faut s’assurer qu’il n’y a pas d’effets indésirables graves ou que, s’il y en a, ils restent exceptionnels. »

5°) Enfin, quel vaccin choisir parmi les 9 ? Réponse du Pr. Fontanet : « La Commission européenne avait fait des commandes à plusieurs sociétés, ne sachant lequel marcherait… On se trouve à gérer un peu l’abondance. On va devoir choisir entre plusieurs vaccins …Ils ont tous des qualités et des défauts… »

N’y-a-t-il pas là matière à conforter les Français dans une position sagement attentiste ?
La sélection
L’arrivée des vaccins anti-Covid-19 n’emballe pas franchement les Français
Arnaud Fontanet face à Jean-Jacques Bourdin en direct
BFMTV / RMC
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