L’Algérie, otage d’un pouvoir corrompu et sénescent
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L’Algérie, otage d’un pouvoir corrompu et sénescent

Par Philippe Oswald - Publié le 21/02/2019
Aux commandes de l'Algérie depuis l'indépendance du pays (1962), le Front de libération nationale (FLN) a investi Abdelaziz Bouteflika, comme candidat pour briguer son 5e mandat à la présidentielle du 18 avril. Le président-candidat aura fêté quelques jours plus tôt son 82e anniversaire. Au pouvoir depuis 1999, Bouteflika est systématiquement réélu au premier tour avec plus de 80% des suffrages exprimés après avoir fait modifier la constitution qui limitait la présidence à deux mandats. Mais voilà près de 15 ans que sa santé précaire l’oblige à de nombreux séjours hospitaliers en France (où vont se faire soigner nombre de cadres algériens en raison de l’état catastrophique des hôpitaux du pays). Le dernier discours d’Abdelaziz Bouteflika date de mai 2012 ! En 2013, un accident vasculaire cérébral (AVC) a cloué le président sur un fauteuil. Depuis lors, de l’avis des médecins qui ont pu examiner les séquences filmées lors de ses rares apparitions, il est certes conscient mais évidemment incapable de diriger le pays. Un diagnostic posé depuis longtemps et bien connu des Algériens eux-mêmes, et pas seulement des opposants à Bouteflika ou au FLN. Cela n’empêche pas le patronat et les principaux dirigeants syndicaux d’appeler à soutenir le président face à une opposition (Front des forces socialistes, Parti des travailleurs) qui, jusqu’ici, n’a jamais paru en mesure de menacer le pouvoir.

Le pays est à l’image de celui qui le préside : gravement malade. Dépendant de la rente pétrolière (comme le Venezuela), il est miné par la corruption d’une oligarchie qui accapare postes et bénéfices. A vrai dire, cela n’a jamais cessé depuis plus d’un demi-siècle. Mais le pourrissement s’est accéléré sous le règne de Bouteflika avec la diminution du pouvoir des militaires qui l’avaient mis en selle après la décennie sanglante des années 90. S’appuyant sur le besoin de stabilité des Algériens épuisés par la lutte contre le terrorisme islamique devenue une guerre civile, Bouteflika a accaparé le pouvoir en partageant le gâteau des bénéfices des hydrocarbures et des commandes publiques avec des cercles de pouvoir issus du renseignement, de l’armée et des affairistes de son entourage. Ce serait aujourd’hui son frère cadet, Saïd Bouteflika, qui dirigerait en sous-main le pays.

L’explosion menace. Pour dénoncer « cette honte du 5e mandat et cet affront fait au peuple algérien », une journée de mobilisation nationale dans tout le pays est annoncée pour le 22 février, mettant les services de sécurité sur les dents. D’autres manifestations contre la candidature de Abdelaziz Bouteflika à sa propre succession sont prévues le 24 février en Algérie et en France (à Paris et à Marseille). Au début du mois, le premier ministre Ahmed Ouyahia avait déclaré que les manifestations appelant au boycott de la présidentielle seraient interdites et que l'Etat ne laisserait « pas semer le chaos ».

Les troubles qui risquent de secouer l’Algérie auront évidemment des répercussions en France, avertit sur RTL (en lien ci-dessous) le journaliste Mohamed Sifaoui, auteur de « Où va l’Algérie ? » (Cerf). Une guerre civile algérienne dans laquelle s’engouffrerait l’islam salafiste pourrait engendrer des millions de réfugiés. En perspective d’un « printemps algérien », ne serait-il pas temps pour la diplomatie française de réviser une politique fort complaisante envers l’oligarchie algérienne ? 
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