La surmortalité est une réalité mesurée au Royaume-Uni : quelques pistes pour la comprendre
Santé

La surmortalité est une réalité mesurée au Royaume-Uni : quelques pistes pour la comprendre

Par Ludovic Lavaucelle - Publié le 12/10/2022
L’été a été meurtrier chez nos voisins d’outre-Manche. Les statistiques officielles indiquent une surmortalité de 15% à 18% de juin à août. On parle ici d’un nombre de décès jusqu’à 18% au-dessus du taux attendu (c’est-à-dire la mortalité moyenne pendant la même période sur les 5 dernières années). Cette augmentation notable est observée dans d’autres pays, en Australie par exemple. Comment comprendre cette augmentation inquiétante ? Les réseaux sociaux bruissent de rumeurs et tirent des conclusions : s’agit-il des conséquences d’effets secondaires des vaccins anti-Covid ? Ou plutôt d’une infection virale plus dangereuse sur le temps long qu’on ne l’avait estimée initialement ? Freddie Sayers a reçu Stuart McDonald, Directeur des analyses prospectives de Lloyd’s Banking Group, géant de la banque et de l’assurance, pour UnHerd (voir l’interview en lien).

Les statistiques officielles du gouvernement britannique sont claires : on observe bien une surmortalité depuis le début de l’été 2022 (03’01’’). Cette tendance est d’autant plus marquante qu’au plus fort des vagues Omicron en janvier et février, la mortalité n’était pas plus forte que la moyenne des 5 dernières années. Le variant Omicron n’a donc pas eu plus d’impact qu’une grippe hivernale. Mais les statistiques de l’été indiquent (06’53’’), par exemple, une surmortalité de 24% dans la catégorie « crises cardiaques ». À l’opposé, la catégorie « cancer » montre une augmentation de 2% seulement alors qu’on s’est inquiété des effets du confinement sur la détection de cette maladie. Les cancers sont souvent des pathologies longues, rappelle McDonald, alors que les problèmes cardiaques peuvent survenir brutalement. L’augmentation générale que l’on observe pourrait indiquer un faisceau de raisons.

Doit-on pointer du doigt les effets secondaires de la vaccination, en particulier à ARN messager ? Les laboratoires eux-mêmes indiquent les risques de myocardites, notamment… McDonald ne voit pas dans les statistiques recueillies de preuves d’une corrélation. La surmortalité observée pendant l’été 2022 intervient alors que les grandes campagnes de vaccination datent de 2021. Les études faites à ce jour indiquent que les effets secondaires graves interviennent dans les 30 à 60 jours après l’injection (15’34’’), donc à court terme… Et ils restent statistiquement rares.

On a observé que les vagues Omicron ont été bénignes par rapport aux vagues initiales Alpha et Delta. Comment alors comprendre un tel pic de surmortalité ? D’abord se rappeler que les contaminations Omicron ont été massivement plus nombreuses que celles des vagues précédentes. On a donc un effet de masse : une toute petite minorité de personnes ont souffert de formes graves mais cette minorité reste significative en nombre absolu. Par ailleurs, la revue Nature vient de publier une étude (12’37’’) qui établit un lien entre hospitalisations pour cause de Covid et problèmes graves cardiaques plus tard. Or les risques cardiovasculaires après une infection virale sont bien connus – parfois 6 à 12 mois après la maladie.

Les conséquences à moyen terme d’une infection au variant Omicron ne constituent pas une explication totalement satisfaisante. Car si l’on sait que l’épidémie a été massive, elle a été aussi d’une faible gravité. La surmortalité observée semble être surtout le symptôme de l’état de délabrement des systèmes de santé, dans des pays pourtant développés et riches comme le Royaume-Uni (23’26’’). Les problèmes cardiovasculaires nécessitent une prise en charge très rapide. McDonald a étudié les indices de fonctionnement des hôpitaux : alors que les ambulances anglaises avaient pour objectif d’intervenir dans les 18 minutes après un appel, le temps réel pour prendre en charge une personne en détresse était en juillet 2022 de 59 minutes ! Immanquablement, ce long retard a eu des conséquences létales pour de nombreux malades. Par ailleurs, le taux d’occupation des lits dans les hôpitaux était de 93%, ce qui est très élevé pour assurer une bonne prise en charge. La surmortalité confirme qu’on ne peut pas gérer un hôpital comme un hôtel ! (28’04’’).

Les politiques de confinement ont aussi joué un rôle délétère : les comportements ont changé (28’51’’) alors que les gens ont fui l’hôpital pendant cette période. Le résultat : les listes d’attente ont augmenté de 50%, atteignant 6 à 7 millions de Britanniques aujourd’hui. Il y a donc un risque majeur, encore masqué, de voir une forte augmentation de pathologies dans le futur proche. Raison de plus pour renforcer les systèmes de santé…

La surmortalité en Angleterre est un phénomène indubitable et inquiétant. Les données officielles ne s’expliquent pas clairement par des effets secondaires liés aux vaccins ou à la maladie elle-même. Le rapprochement avec les critères de fonctionnement des hôpitaux (nombre de lits, disponibilité des urgences) semble, au contraire, démontrer un lien étroit…
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Investigating the mystery of excess deaths
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