« Gilets jaunes » : un cri de détresse travesti en scénario insurrectionnel par le pouvoir
Politique

« Gilets jaunes » : un cri de détresse travesti en scénario insurrectionnel par le pouvoir

Par Philippe Oswald - Publié le 24/11/2018
Le préfet de police avait prévenu : « Personne ne passera sur les Champs-Elysées !» Peu après 10h du matin, ce samedi 24 novembre, les premiers barrages avaient cédé sans coup férir, sous les acclamations de manifestants : « La police avec nous ! » Deux heures plus tard, des Gilets jaunes avaient même réussi à dresser une barricade sur « la plus belle avenue du monde », une image promise à un succès médiatique mondial ! Malheureusement, profitant de l’aubaine, des « cagoulés » faisaient aussi leur apparition … On voyait notamment ces Black Bloc surgir au rond-point des Champs-Elysées et passer à l’action dans la fumée des gaz lacrymogènes et sous les lances à eau de la police … Déjà des pavés étaient déchaussés. Symbole d’un pouvoir en état de siège, toutes les rues autour de l'Elysée, de Matignon et de l’Assemblée Nationale étaient bouclées. Le scénario insurrectionnel prenait corps.

Pendant ce temps, le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner dénonçait pêle-mêle l’« ultra-droite », des « séditieux » et prétendait que les manifestants suivaient « les consignes de Marine Le Pen ». Un amalgame propre à attiser la colère des Gilets Jaunes ! Pourtant, à l’heure où le ministre s’exprimait, les affrontements et la casse à déplorer dans Paris au passage des manifestants restaient heureusement bien en-deçà des débordements de précédentes manifestations dûment "encadrées", telle celle du 1er mai où se déchaînèrent les Black Bloc. Sans oublier les manifestations qui se poursuivaient pacifiquement en province, de nombreux « Gilets jaunes » étant restés dans leurs régions pour leur 2ème journée de mobilisation nationale.

Montés à Paris ou mobilisés en province, les Gilets jaunes restent aussi déterminés. Leur cible : Emmanuel Macron et le gouvernement qu'ils jugent totalement déconnectés de leurs difficultés. « Ils ne sont pas là pour nous asservir, ils sont là pour nous servir », selon le mot d’un manifestant recueilli en Moselle par RTL. Un sondage Odoxa pour Le Figaro et Franceinfo paru la veille indiquait que près de 8 Français sur 10 trouvaient légitime l'appel des Gilets jaunes à bloquer Paris, en dépit des risques d'attentat terroriste agités par le ministre de l'Intérieur et le recensement des accidents et débordements devenu un « élément de langage » des autorités. Ces intimidations semblent avoir du mal à convaincre jusqu’au sein des sympathisants de LREM, quatre sur dix estimant justifié le mouvement des Gilets jaunes. En cause, le pouvoir d’achat, le « ras-le-bol fiscal », l’injustice d’une écologie punitive sur les carburants mais qui « oublie » le kérosène des avions et le fuel lourd des tankers. Sans parler des menaces sur les pensions de réversion…

Quel que soit le bilan de ces manifestations, une chose paraît acquise : le feu renaîtra tant que le gouvernement restera sourd aux revendications des Gilets jaunes. Si en particulier Edouard Philippe persiste à « maintenir le cap » en ne renonçant pas aux nouvelles augmentations des taxes sur les carburants le 1er janvier, le télescopage avec le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu sera explosif ! Il verra la coalition des citoyens de la « France périphérique » avec les classes moyennes, celles qui paient l’impôt sur le revenu, quelle que soit leur couleur politique. Ainsi la réunion de Français de gauche, du centre et de droite, qu’Emmanuel Macron avait l’ambition de créer avec « En Marche », se réalisera contre lui.

Concentré contre la hausse des prix des carburants et des taxes en général, ce mouvement est aussi l'expression d'un « cri de colère » et la défense d'un mode de vie, constate Eric Charmes, chercheur en études urbaines à l'université de Lyon, interviewé par France info.
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